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Les conseils de Tapie sont-il vraiment applicables au PSG ?

Publié le jeudi 16 mars 2017 à 20:53 par Philippe Goguet
Ce mercredi, l'ancien président de l'OM Bernard Tapie a donné dans le journal L'Equipe son avis sur le récent PSG après la déroute à Barcelone. Il a également donné quelques conseils au club parisien pour aller chercher la Ligue des Champions, l'ancien boss de Marseille ayant réussi dans cette quête au cours des années 90. Retour sur ses propositions et analyse.

Accepter que les gros soient favorisés

Comme l'explique Bernard Tapie, les gros clubs seront toujours favorisés par l'arbitrage, notamment à domicile : «Tu es allemand, tu arbitres PSG-Barcelone. Eh bien le PSG, tu n’en as rien à faire. Rien. Le club qui t’a fait rêver, c’est le Barça, pas Paris. Quand Cavani est bousculé dans la surface de réparation, ça ne finit pas pareil que si c’est Messi. C’est comme ça, surtout quand le club mythique joue à domicile. Regardez lorsque le PSG bat Nancy (1-0 le 4 mars dernier). Sur un penalty inexistant. Les dirigeants du PSG doivent se rendre compte de ça ou arrêter le football parce que le football fonctionnera toujours comme ça.»

Les dirigeants du PSG n'ont pas perdu de temps pour contester cette affirmation puisque le fameux courrier envoyé à l'UEFA pour critiquer l'arbitrage de Deniz Aytekin est parti avant même l'entretien accordé à L'Equipe. Si le but n'est pas de rejouer le match, il est en revanche de faire peser le PSG au niveau européen. Indirectement, le thème a été évoqué par Unai Emery en conférence de presse quand l'entraîneur parisien a parlé de quête de respect. Et si rien ne garantit que le PSG ne subira pas une Aytekin dans le futur (cf Bayern/Juventus de l'an passé avec deux énormes erreurs contre les Italiens), l'ampleur du vol pourrait bien être atténuée. Et avec un penalty gentillet sifflé en moins, c'est Paris qui serait aujourd'hui en quart de finale...

Attirer un Beckenbauer

Avant le PSG, l'OM de Tapie s'est fait voler en Coupe d'Europe puisque le club dirigé par l'homme d'affaire français est éliminé sur une main du fameux Vata en 1990, par le Benfica de Ricardo et Valdo. Tapie explique la stratégie qu'il a alors suivie à ce moment : «En réalité, j’ai fait venir Franz Beckenbauer quelques mois plus tard. Il a entraîné quelques mois (de septembre à décembre 1990) puis est devenu manager (directeur sportif jusqu' à la fin de la saison). C’était incroyable. Les arbitres lui demandaient des autographes sur le ballon du match. On a bénéficié de son incroyable notoriété. Il nous a offert son prestige. Les plus grands clubs favorisés, ça arrange les instances. Pour elles, c’est un peu la promesse de quarts de finale, de demi-finales et d’une finale exceptionnels.»

Le PSG a eu à une époque un grand nom du football mondial sur son banc de touche, Carlo Ancelotti, accompagné par Leonardo un directeur sportif à peine moins prestigieux et lui aussi passé par le grand Milan AC.  Si Paris s'est fait quelques fois voler en L1 (on se rappelle d'une extraordinaire sortie du Brésilien à Montpellier), c'était effectivement rarement le cas en Coupe d'Europe avec notamment un but hors-jeu de plusieurs mètres accordés à Paris face au Barça. Malgré ses trois coupes d'Europe, Unai Emery n'a pas encore la renommée de son prédécesseur italien tandis qu'aucun des dirigeants actuels n'a un CV de top niveau ni un carnet d'adresses d'habitué du dernier carré. Quant à Nasser Al-Khelaïfi, sa voix porte en France mais pas encore en Europe.

Reste que ces influences extérieures ne sont pas vraiment conjuguées à des actions que Paris pouvait déjà mettre en place, le club s'étant déjà fait sévèrement désavantagé par l'arbitrage du côté de Chelsea en 2015. Avant le match, Unai Emery n'a jamais évoqué l'arbitre et son impact dans sa conférence de presse d'avant-match, une grande spécialité de certains coaches de haut niveau (Mourinho notamment). A aucun moment, ses joueurs n'ont su jouer avec l'arbitre, contrairement aux Barcelonais. Le spécialiste en la matière qu'est Motta était peut-être absent mais ses partenaires n'ont pas su le remplacer dans ce rôle. Autre signe d'un PSG qui ne sait pas jouer avec les règles, aucun Parisien n'a pris le moindre carton jaune pour antijeu quand le Barça poussait. Alors qu'il fallait gagner du temps à tout prix, même le joueur le plus à même de le faire, à savoir Kevin Trapp, n'a jamais tenté de tricher un peu sur le chronomètre. Si Paris peut s'attirer un Beckenbauer de l'époque, l'équipe doit aussi apprendre le vice.

Signer un grand manager

Tapie cite l'exemple de Beckenbauer, d'abord entraîneur puis manager, et il appuie sur le besoin d'avoir une figure forte dans les coulisses : «Le PSG a besoin d’un très, très grand manager dont le nom signifie quelque chose. Il a suffisamment d’argent pour se le payer. Kluivert, il faut arrêter. Il vous a fait rêver ? Pas moi. Kluivert, il ne m’a rien fait. Mais enfin… Dans le très haut niveau, il y a des mecs fabuleux.»

Le président parisien a été pour le moins clair dernièrement dans son débrief de Barça/PSG : l'entraîneur va continuer sa mission. Indirectement, et vu qu'il est dur de changer un effectif pareil, c'est logiquement le reste de l'organigramme qui est menacé, donc Kluivert et Létang. Leurs bilans (ou leurs CVs) ne parlent pas vraiment en leur faveur : Kluivert était sélectionneur de Curaçao tandis que le premier rôle d'Olivier Létang était de gérer le parking du Camp des Loges. Sur ce point, Tapie a probablement visé juste. Paris n'a jamais réellement su remplacer Leonardo et les premières rumeurs concernant un directeur sportif apparaissent déjà avec Monchi et Olabe. Pour autant, il faut au moins porter au crédit de Kluivert l'arrivée de Draxler, un vrai talent, mais il reste plus que jamais un dirigeant en apprentissage et, si son discours passe très bien auprès des joueurs, son nom ne pèse pas grand chose dans les instances, le lieu du prochain grand combat du PSG. 

Pas de besoin d'un très grand joueur 

Paris a souffert du talent individuel de certains Barcelonais mais l'ancien patron de l'OM réfute ce besoin d'avoir une superstar au PSG : «C’est quoi un très grand joueur ? Des joueurs d’exception, il y en a quatre ou cinq, pas plus, et ils jouent en Espagne ou en Angleterre. Ils n’iront jamais ailleurs. Ça n’empêche pas d’ avoir un niveau fabuleux. La preuve avec le Bayern Munich. Et ses dirigeants sont à la hauteur.»

L'été dernier, le PSG a couru sans succès après Neymar ou encore Griezmann avant de se rabattre sur... Jesé. Attirer une superstar en L1 est très compliqué et le PSG a même laissé partir l'été dernier la seule qu'il possédait, Zlatan, car il estimait que l'apport extrasportif était moindre que le sportif, notamment en Champions League. En allant chercher Emery pour coacher des joueurs de calibre international mais moins starisés, c'est même la stratégie du PSG depuis un an que l'ancien boss de l'OM décrit. Reste que c'est une des superstars du Barça, Neymar, qui a fait basculer le match de l'année, montrant aussi les limites d'un système sans immense tête d'affiche. Quant à la valeur des dirigeants du Bayern, ceux du PSG sont loin d'avoir leur CV (mais ils ont évité la case prison...) et cela rejoint l'affirmation précédente. Les Rummennige et Hoeness à la parisienne n'existent effectivement pas.

Evaluer l'effectif par les moins bons

Après l'équipe dirigeante du PSG, Tapie parle de son club de coeur, l'OM, et réveille une vieille thèse de Cruyff qu'on peut très bien appliquer au onze parisien : «Une équipe ne se juge pas sur les trois meilleurs mais sur les cinq moins bons.»

Comme le fait comprendre l'ancien boss d'Adidas, quelques uns des meilleurs joueurs du PSG auraient leur place dans l'équipe qui les a éliminés (il suffit de lire les rumeurs mercato pour s'en convaincre), mais de nombreux en sont bien loin. Au coup d'envoi à Barcelone, on peut se demander quelles sont les références au plus haut niveau d'une moitié de l'équipe et quelle place ils auraient pu occuper dans le onze adverse : Trapp, Kurzawa, Meunier, Lucas voire Rabiot ont du talent mais aussi un manque flagrant d'expérience et des lacunes bien réelles. La plupart sont à peine internationaux, ont 25 ans ou moins et ils vivaient l'un si ce n'est le plus gros match de leur carrière. Le cocktail n'a pas pardonné et, s'ils ne sont forcément responsables de l'élimination, ils n'ont pas forcément prouvé qu'ils pouvaient incarner le futur d'un projet visant la Ligue des Champions. Paris doit se renforcer sur quelques postes et l'élimination l'a prouvé.

Construire des stars

A défaut de pouvoir attirer des stars, cf paragraphe précédent, l'homme d'affaires préconise de les former soi-même : «A mon époque, les recrues n'étaient pas des vedettes quand elles arrivaient. Elle le devenaient en brillant avec l'OM. Prenez Abedi Pelé, Papin, Waddle, Boksic, etc.»

C'est effectivement un point défaillant du projet parisien puisqu'aucun des joueurs achetés par le PSG n'est devenu une star de niveau mondial. Verratti, Rabiot ou encore Marquinhos plaisent aux clubs et aux amateurs de ballon rond mais aucun n'est aujourd'hui plus qu'un joueur de foot. Il est dans les cartons du PSG de mettre en avant sa pépite nommée Verratti mais ce n'est aujourd'hui qu'un projet. La Ligue 1 reste aussi un souci de par sa faiblesse et sa faible diffusion dans un football mondial toujours plus médiatisé mais les Parisiens manquent aussi d'exploits. Quand Papin est Ballon d'Or en 1991, l'OM avait éliminé la référence ultime de l'époque, le Milan AC double champion d'Europe en titre. Or, Paris a trébuché sur le Barça, laissant à un des rois de l'Europe sa couronne... Plus récemment, c'est en faisant tomber des gros que Griezmann est passé dans une autre dimension. Et son club n'a pourtant pas les moyens financiers du PSG.

Dans les multiples pistes données par Tapie, et malgré l'aspect populiste de certaines déclarations, tout n'est pas à négliger et l'ancien boss de l'OM est probablement l'un des mieux placés quand il s'agit d'évoquer l'influence que se doit de développer le PSG hors du terrain. Pour le reste, ses idées correspondent déjà en partie à ce qu'a commencé le club parisien au cours des dernières saisons. Reste que gagner la Ligue des Champions prend du temps et qu'il n'existe pas de recette miracle. Surtout quand l'adversaire s'appelle Barcelone et joue à la maison.


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