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Bodineau, coach des U19F : « De l'or en barre au PSG »

Publié le vendredi 23 septembre 2016 à 12:00 par Bruno Hermant
Après son premier match de Challenge National, victorieux contre Metz, Pierre-Yves Bodineau nous a reçus au siège du PSG. L'entraineur de l'équipe U19 Féminines nous a fait part de ses impressions pour cette nouvelle saison.

Bonjour Pierre-Yves, merci de nous recevoir encore une fois. Comment s'est déroulée cette première en Challenge National U19 face au FC Metz ?

Bonjour, merci à vous de bien vouloir parler du travail de nos filles. Pour ce premier match face à Metz, cela s'est bien passé, nous l'avons emporté par 5-0 en dominant la rencontre assez logiquement. La coach du FC Metz est assez surprise du niveau que nous présentions pour ce match, notre équipe alignée était tout de même assez jeune. Elle se demandait également combien de filles avaient participé à la finale du Challenge remportée contre Lyon l'an dernier. Il est vrai que nous avions pas mal de remplaçantes sur la finale, même des filles qui n'étaient pas sur la feuille de match, mais que nous avions emmenées avec nous à Tarbes. Et cela faisait une bonne moitié de l'effectif actuel.

En effet, beaucoup de filles ont quitté votre groupe pour l'étage supérieur.

Exactement. Cela a rassuré la coach, vu l'écart, même si elle était tout de même surprise par le niveau de plusieurs de nos joueuses sur le terrain face à son équipe. 

Dans les schémas de jeu, techniquement, dès que Sana Daoudi au milieu, contrôlait le ballon, on sentait que votre équipe était au-dessus, qu'il n'y avait aucune opposition. 

Sana s'est déjà vraiment bien sentie dans le match, cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas joué, et à son poste. Pour le moment, pour des raisons tactiques, Patrice Lair lui demande de jouer à gauche en D1. Comme elle n'avait joué qu'un bout de match en préparation à ce poste, je me suis demandé si elle allait tenir tout le match en tant que milieu centrale et elle a su élever son niveau. C'était très intéressant.

Quel sera l'apport des filles qui évoluent en D1F dans votre groupe cette saison ? Il sera forcément limité vu l'âge des « grandes », vous retrouverez Lina Boussaha, Sana Daoudi...

Pour Lina Boussaha, c'est un peu particulier parce que, malgré sa présence dans le groupe de préparation, elle ne fait pas partie du groupe D1 pour le moment. J'aurais préféré que le club organise sa scolarité près du camp d'entrainement, à Saint-Germain, au centre de formation, comme d'autres l'an dernier (Sarr, Salvador, Karchouni notamment). Cela ne s'est pas fait. 

«Ce sont des filles qui sont 100% Parisiennes, qui possèdent une culture club très forte, qui connaissent les entrailles du club. Et c'est très difficile pour une joueuse extérieure de s'imprégner de tout ça. Certaines, considérées comme les meilleures joueuses du monde, se sont ratatinées au PSG» 

Y a-t-il une raison à cela ? Cela vient-il de son emploi du temps ? De l'envie de la joueuse ? Du coach de la D1 ? 

La joueuse voulait absolument jouer avec les pros dès le début de saison, elle a même fait des sacrifices au niveau scolaire, elle aurait pu choisir une autre filière, elle s'est engagée dans une filière pour privilégier sa carrière footballistique. Elle est déterminée à aller le plus loin possible, et je comptais l'aider à faire en sorte qu'elle fasse partie de ce groupe. Maintenant, il est vrai aussi que Patrice Lair a considérablement rajeuni son effectif. Et il serait plus dans l'optique de recruter des joueuses qui un peu plus d'expérience, que des joueuses qui seraient formées au club, de l'étage inférieur. Je ne suis pas totalement d'accord, parce que ce sont des filles qui sont 100% Parisiennes, qui possèdent une culture club très forte, qui connaissent les entrailles du club. Et c'est très difficile pour une joueuse extérieure de s'imprégner de tout ça. On l'a vu, on a eu des exemples de filles considérées comme les meilleures joueuses du monde et qui se sont ratatinées au PSG. Il n'y a que des filles comme Laura Georges, Shirley Cruz qui s'en sont sorti totalement. Une joueuse comme Véro Boquete par exemple, je suis convaincu qu'elle va totalement s'intégrer. Il faut tout de même un état d'esprit particulier. Et Patrice Lair l'a dit, il ne veut pas se tromper, il ne faudra pas se tromper dans le recrutement. Parce qu'il sait que cela pousse derrière. Il a des joueuses comme Sandy Baltimore, Lina Boussaha, qui sont très costaudes. Elles ne sont pas encore prêtes tout de suite, mais...

Il est vrai que les joueuses sont assez jeunes encore.

«Nous avons de l'or en barre au PSG avec nos jeunes et il y'en aura encore. Il faut que l'on s'appuie sur notre centre de formation»

Oui, Sandy Baltimore n'a que 16 ans, Lina Boussaha 17, Sana Daoudi 18, après il y a un cas exceptionnel qui est Marie-Antoinette Katoto, qui ne soufflera ses 18 ans qu'en novembre mais qui est déjà à un niveau très élevé. Marie, par exemple, il serait très dommage de s'en priver en Equipe de France, vu le manque d'attaquantes que cette équipe possède pour le moment. Je suis très fier pour elle, parce qu'elle a toujours travaillé, elle a toujours repoussé ses limites, sans choisir ses matchs, et c'est vraiment intéressant. Si on lui donne l'opportunité d'être régulièrement alignée, elle va faire très mal. Je pense que nous avons de l'or en barre au PSG avec nos jeunes et il y'en aura encore. Il faut aussi que l'on s'appuie sur notre centre de formation.

Vous parliez tout de même d'homologuer un centre de formation, une grosse structure, ce projet est-il tombé à l'eau, mis en stand-by ?

«L'enseignement du football sera fait de manière transversale. Ce sera le cas pour toutes les équipes. On peut pas détruire l'image du PSG en faisant jouer une équipe qui n'est pas à l'image de tout ce qui se fait actuellement au club»

Non, on veut au moins consolider tout ce qui a été mis en place. J'ai la chance de bénéficier tout de même d'un staff impliqué et totalement dévoué, composé de Mina Lamlahi, préparatrice physique, Guillaume Lemire, entraineur des gardiens et je n'oublie pas Yasmina Sehouli, notre dirigeante bénévole. C'est vraiment un plus incontestable par rapport aux années précédentes. Nous avons grandi. Nos conditions d'entrainement s'améliorent, mais j'aimerais qu'on se rapproche de celui des garçons, car à ce niveau, nous sommes encore un peu loin. Je ne demande pas un staff pléthorique, au contraire, mais juste que l'on travaille de façon cohérente et transversale avec les garçons. L'arrivée des techniciens espagnols au centre de formation fait, qu'au niveau de jeu, l'enseignement du football se fera de manière transversale. Ce sera le cas pour toutes les équipes. On ne peut pas détruire l'image du Paris Saint-Germain en faisant jouer une équipe qui n'est pas à l'image de tout ce qui se fait actuellement au club. C'est important pour eux, mais surtout pour le club. Et pour les filles, de savoir qu'elles comptent autant que les garçons, et qu'elles sont sur un même pied d'égalité en tant qu'athlète. Elles ne demandent pas les mêmes salaires évidemment, bien qu'elles ne cracheraient pas dessus. Nous avons vraiment augmenté nos conditions d'entrainement en qualité, puisqu'on a un nouveau terrain synthétique à Charléty, un vestiaire à l'année à notre disposition, pas mal de matériel pédagogique, un staff renforcé. On consolide nos acquis. Maintenant, on peut penser que cela est suffisant pour être champion de France de notre catégorie, pour assurer notre formation, puisque forcément, il y a eu de la réussite. Mais pour un technicien passionné, ambitieux et qui veut développer le football féminin au PSG, je souhaiterais qu'elle puisse avoir accès à d'autres compétences et moyens encore.

Le fait de voir Patrick Kluivert, le directeur du football, arriver au PSG et visiter les féminines au centre d'entrainement n'invite-t-il pas à l'optimisme ? Il pourrait mettre en charge une personne qui s'occupe à plein temps des féminines. La recherche d'une direction sportive est-elle en attente ? 

Le club effectue une recherche pour un directeur sportif spécifique à la section féminine, puisque Patrice Lair a une mission, remporter des titres. Moi, j'ai la mienne, lui amener les meilleures. Pour donner une ligne directrice, cibler des pistes sur d'éventuels transferts, ne pas se tromper par rapport à une jeune qui serait au centre de formation, calculer les paramètres nécessaires pour ne pas bloquer sa progression... il faut, quoiqu'il en soit, d'autres idées, nommer un décideur. Cela fait cinq ans que le PSG a investi dans cette section, peut-être faut-il du temps pour repartir sur une bonne lancée, même si le timing n'est pas spécialement le meilleur.

«L'objectif du club pour cette section, c'est de former des joueuses pour l'équipe première. Pour moi, l'entraîneur de l'équipe D1, les joueuses, il y a forcément un objectif de résultats»

Saison de transition en quelque sort, mais l'objectif de ce groupe reste tout de même de garder le titre ?

L'objectif du club pour cette section, c'est de former des joueuses pour l'équipe première. Il n'y a pas, en tant que tel, d'objectif de résultats. Maintenant, pour moi, pour l'entraineur de l'équipe D1, pour les joueuses, il y a forcément un objectif de résultats. Notamment par rapport à nos rivaux. Lyon nous a fait mal, il a tout raflé en sénior. Même si au niveau de la formation, nous les avons battues, l'idée est de continuer sur cette dynamique. Les expériences passées ont fait beaucoup de mal, il faut du temps pour laver tout ça, j'étais d'accord avec Patrice Lair dans le principe de vouloir tout gagner, dans toutes les compétitions, dans toutes les catégories, même si en tant que formateur, je ne peux et ne dois pas être forcément compétiteur. Mais nos joueuses, elles, le sont plus que tout. Elles ont déjà goûté à la victoire, à la saveur d'un titre et donneraient beaucoup pour revivre cela. Forcément, je vais essayer de me servir de cela mais sans non plus les pousser, parce que notre objectif reste d'abord de sortir des joueuses pour le club. Mais là aussi, malheureusement, cela va être plus difficile d'intégrer le groupe D1. Parce qu'il est très jeune. Patrice Lair a récupéré de très bonnes joueuses, mais qui sont aussi très jeunes. Donc pour intégrer son groupe, il va falloir qu'elles soient très très fortes. Et donc, forcément, pour se faire remarquer, elles veulent  garder ce titre et tout gagner. 

Comment s'articule votre groupe ? L'an dernier, vous aviez un groupe « pro » de 9 joueuses U19, dont 6 qui ont intégré le groupe D1, Couturier qui est partie à Rodez en prêt, Daoudi qui a signé un contrat fédéral d'un an, etc.

Pour le moment, je pense qu'elles sont un peu toutes à l'épreuve avec le coach du groupe pro. Le choix de Cathy Couturier est le bon, c'est une très bonne joueuse et une belle athlète, mais elle n'aurait pas eu le temps de jeu escompté sachant que la Coupe du Monde U20 se profile. Daoudi, Cissoko, elles devraient surement prolonger. Après certaines sont parties, elles pourraient revenir dans le futur si tout se déroule bien pour elles. Laura Georges et Marie-Laure Délie en sont l'exemple. Après, sur certains postes, ce sera plus compliqué, mais on a des exceptions. Pour le moment, je n'ai qu'un groupe U19. J'ai étoffé mon groupe pensant que j'aurais moins de joueuses à disposition, qu'elles seraient pour beaucoup intégrées, pour les entraînements tout du moins, au groupe D1. Mais ce n'est pas pour le moment fait ainsi. Ce n'est pas la politique immédiate de les accueillir. Je pense, j'espère, que cela viendra à terme, déjà pendant les vacances scolaires, ou en deuxième partie de saison. Ce qui serait dans l'intérêt du club, sans affaiblir le groupe D1.

«Marie (Katoto) ? Patrice Lair compte déjà beaucoup sur elle. C'est une joueuse qui veut tout gagner, avec un état d'esprit formidable»

Quelles seront les filles qui du coup « redescendront » du groupe D1 pour cette saison ? 

Pour le moment, il n'y a que trois filles qui s'entrainent avec le groupe pro. Romane Salvador, Marie-Antoinette Katoto et Sana Daoudi. Pour le moment, j'ai deux gardiennes de mon groupe qui sont blessées lourdement, Heloise Rambolosoa et Tiguida Diaby. Il est donc probable, en fonction du recrutement, que Romane joue avec nous une bonne partie de la saison. Sana devrait aussi nous rejoindre fréquemment. Pour Marie-Antoinette, je ne pense pas qu'elle jouera avec nous, Patrice compte déjà beaucoup sur elle. Après, sur les phases finales, si nous nous qualifions, je pense qu'elle voudra participer. C'est une joueuse qui veut tout gagner, avec un état d'esprit formidable. Je pense qu'on pourrait faire sans elle, mais il est certain que si elle nous rejoignait dans ces moments, même une fille qui perdrait sa place à son profit ne serait pas déçue tant elle apporte à ce groupe. C'est une fierté de montrer à la France entière une joueuse de ce talent la, qui représente notre centre de formation. Les autres filles sont encore avec moi pour le moment. D'autres pourraient être amenées à s'entrainer avec le groupe D1 dans un futur proche, il y aura des paramètres à voir dans le temps. Tout le monde doit s'installer, s'imprégner...

Pour revenir à notre débat précédent, y a-t-il encore des filles qui sont sous contrat en Pôle FFF ou INSEP ?

Nous avons encore deux filles, Heloise Rambolosoa et Selma Zemzem. Le club n'étant plus un club d'accueil, sauf exception, nous ne devrions pas les prendre. Si nous les prenons, elles ne feraient pas partie de l'effectif U19 Nationales, du moins, on n'aurait pas proposé à toutes les joueuses de nous rejoindre. C'est assez compliqué à gérer. Les coachs des clubs de Lyon ou de Juvisy se plaignent d'avoir beaucoup de filles aux pôles toute la semaine. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée par ailleurs : récupérer des filles que le week-end, qui pourraient ne pas jouer le jeu, choisir leurs matchs, se «blesser » à l'approche des sélections. Au PSG, quand on a expliqué aux filles, qu'elles ont compris que pour jouer en équipe première, il était certainement plus facile de rester à 100% au club, s'impliquer à fond, et que cela viendrait naturellement, les filles ont fait le choix de quitter les structures fédérales. Quand on demande aujourd'hui à Anissa Lahmari, Grace Geyoro, Marie-Antoinette Katoto, ce qu'elles ont fait de bien, elles répondent d'être sorties des pôles ! Je sais que je ne me fais pas que des amis à la Fédération, au contraire. Mais c'est dans l'intérêt des joueuses et du club.

«Patrice Lair sait qu'il a hérité de quelque chose d'énorme et qu'il peut faire quelque chose de très très fort»

Pouvez-vous nous dire comment votre homologue en D1 voit ces filles ?

Il l'a déjà déclaré, il le découvre mais il est très surpris de la qualité des filles. Il n'avait jamais travaillé avec un groupe si jeune et quelque part, c'est une autre part du travail d'entraineur. Il sait qu'il a hérité de quelque chose d'énorme et qu'il peut faire quelque chose de très très fort. 

Nous remercions encore Pierre-Yves Bodineau pour son accueil et sa disponibilité et lui souhaitons tous les succès cette année, et surtout garder le titre de Champion de France U19 Féminin. 
L'article a été réalisé avant la deuxième journée du Challenge National U19, où le PSG affrontait l'AS Nancy-Lorraine, victoire 13-1 du PSG.


Vous pouvez retrouver les commentaires de l'article sous les publicités.

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