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Cattenoy (ex Dir. Préformation): «L'arrivée de QSI a surtout permis d'améliorer les structures et de compléter les staffs»

Publié le mercredi 5 octobre 2016 à 19:32 par Dubdadda
Avant de s’envoler pour les Etats-Unis et intégrer l’encadrement technique des Chicago Fire (MLS), Cédric Cattenoy, ancien directeur de la préformation du PSG, a accepté de répondre en exclusivité à nos questions et revenir sur ses quinze années passées dans le club de la Capitale. Voici la première partie de cette interview dans laquelle le technicien parisien revient sur son parcours et évoque la préformation sous tous ces aspects.

Son parcours au PSG

Pour ceux qui ne vous connaissent pas, pourriez-vous nous décrire votre parcours et revenir sur les circonstances de votre arrivée au PSG ?

Cédric Cattenoy : «Je suis arrivé au PSG en août 2001. Auparavant, j'occupais le poste de responsable technique du FCM Villepinte (club important de Seine Saint-Denis réputé pour la formation de ses jeunes à l'époque) qui était en partenariat avec le PSG. Patrice Lecornu (directeur de la formation) et François Gil (responsable de la préformation), que j'avais connus au Red Star lorsque j'étais responsable de l'école de football, m'ont proposé de rejoindre le club de la capitale.

Quelles fonctions occupiez-vous au PSG à votre arrivée ? Ont-elles évolué depuis ?

Lorsque je suis arrivé au club, j'avais différentes missions : 

  • coach adjoint des 18 ans nationaux (génération 85 : Kantari, Dramé, Haddad…) avec Michel Bibard comme entraîneur principal
  • éducateur des 18 ans DH (association)
  • formateur sur le brevet d'état 1er degré option football au CFA omnisports
  • recruteur sur le département de la Seine Saint Denis sous la responsabilité de Camille Choquier

Puis en 2002 à 2005, j'ai été en charge des moins de 16 ans nationaux (devenus U17 nationaux) avec les générations nées en 1986, 1987 et 1988. En 2005 à l'arrivée de Bertrand Reuzeau (à la tête du centre de formation), j'ai récupéré la responsabilité de la préformation et je me suis occupé des 14 ans fédéraux qui sont devenus ensuite les U15 DH. En septembre 2014, en plus de mes fonctions sur la préformation, j'ai été nommé directeur technique de la PSG Academy.

Pourriez-vous nous expliquer en quoi consistent ces académies ?

«Les academy PSG ont un double objectif : développer la marque Paris Saint Germain et promouvoir le savoir faire du club en terme de formation.»

Les academy PSG ont un double objectif : développer la marque Paris Saint Germain et promouvoir le savoir faire du club en terme de formation. J'avais comme fonction la création des programmes techniques et la formation des éducateurs locaux. Cela m'a permis de voyager dans de nombreux pays (Chine, Indonésie, Inde, États Unis...) et de découvrir différentes cultures.

En l'espace de 15 ans, quelles sont les évolutions les plus importantes observées dans votre métier ?

Le métier d'éducateur est en évolution constante. Le football évolue mais les jeunes aussi (génération y et maintenant z). Il faut donc les comprendre pour adapter les messages pédagogiques que l'on veut faire passer.
Cependant, le plus gros changement concerne l'environnement des joueurs. Aujourd'hui  dès le plus jeune âge, la plupart ont un conseiller qui va les accompagner durant leur parcours. 

Quelle génération passée sous vos ordres était selon vous la plus impressionnante ? Nous avons le souvenir d'une génération 94 (Yaisien, Ikoko, Bourdin, Habran, etc) exceptionnelle d'un point de vue collectif au cours des deux années de préformation (invaincue en championnat).

J'ai vraiment pris énormément de plaisir à encadrer la génération 94. Tout au long de la saison 2009/2010, nous avons fait des matches de grande qualité sur le plan collectif battant des records de victoires et de buts marqués. C'était un groupe complet composé de bons joueurs qui aimaient vivre ensemble et cela se ressentait sur le terrain. Pour les passionnés qui suivent les jeunes du club, le tournoi Nike organisé au Camp des Loges restera dans les annales pour la qualité du jeu produit avec en plus une victoire 6-0 en finale contre le FC Nantes en 2 x 20 minutes. Les générations suivantes, ont eu aussi de la qualité dans le jeu. Bien faire jouer les équipes a toujours été ma priorité.

Quels sont vos meilleurs souvenirs ?

«Je retiendrai notre victoire au championnat de France UNSS avec la génération 1997 (Augustin, Nkunku, Ballo Touré...)»

Sur la catégorie U15, il y en a de nombreux car les moments de joie ont toujours été intenses lors de nos différentes victoires en championnat, en coupe ou en tournois. Cependant je retiendrai notre victoire au championnat de France UNSS avec la génération 1997 (Augustin, Nkunku, Ballo Touré...). Nous avions battu l'OGC Nice en finale 6 à 2 sur le stade Marcel Saupin de Nantes.

Quels joueurs vous ont le plus marqué ?

Difficile de répondre à cette question car j'ai eu la chance de côtoyer de très bons joueurs durant toutes ces années. La liste risquerait d'être longue mais surtout j'ai toujours privilégié l'équipe et le collectif avant l'individualité.

La préformation

Est-ce qu’il existe beaucoup de centres de préformation en France ? Pourquoi le PSG a t’il décidé de créer ce type de structure ?

La plupart des clubs professionnels ont aujourd’hui leur structure de préformation. Quant à la fédération, elle a mis en place des pôles répartis sur tout le territoire pour détecter et développer les meilleurs joueurs U14 et U15 des régions. Le PSG a mis en place une structure de préformation depuis plus de 10 ans car c'est un accélérateur de formation.

Vous avez vécu “l’avant et l’après Qataris”, est-ce que l’arrivée de ces nouveaux propriétaires a provoqué rapidement de réels changements dans votre travail ? Avez vous pu profiter à votre niveau de l’augmentation du budget de fonctionnement ? 

«L'arrivée des Qataris a surtout permis d'améliorer les structures et de compléter les staffs.»

L'arrivée des Qataris a surtout permis d'améliorer les structures et de compléter les staffs. Par exemple cette saison, de nombreux travaux ont été effectués dans la structure d'hébergement de Verneuil afin de créer un véritable lieu de vie pour les jeunes. Et au mois de janvier dernier, deux entraîneurs adjoints et un préparateur physique sont venus compléter l'encadrement sportif.

Pourquoi la préformation est-elle basée à Verneuil ? Est-ce prévu qu'elle soit regroupée dans le nouveau Centre d'entraînement à Poissy ?

La capacité d'hébergement du centre de formation est limitée, il a donc fallu trouver une structure ailleurs. Le cadre de la base de loisirs de Verneuil est très agréable et permet aux jeunes de suivre un double projet. Normalement, la préformation devrait être intégrée dans le centre d'entraînement de Poissy. Il faudrait demander au nouveau directeur du centre de formation pour en avoir confirmation.

Pourriez-vous nous décrire une semaine type pour un jeune du Centre de préformation ? 

Les jeunes partagent leur journée entre le collège et le stade. Ils ont 4 séances par semaine et un match amical tous les 15 jours, le mercredi. Comme cela, ils sont chez eux tous les week-end et profitent de leur famille.

Votre mission est de préparer ces très jeunes joueurs à intégrer le Centre de Formation. Est-ce que l'on peut dire qu'une très grosse part du travail ne concerne pas uniquement le football mais aussi la vie en collectivité, l'éducation plus généralement ? 

L'éducation au sens large est très importante. Il ne faut pas oublier que les joueurs viennent d'horizons différents, il est donc indispensable d'établir des règles et de faire passer des valeurs au quotidien. Concernant le football, le travail est immense car même si les joueurs ont des qualités, il faut leur apprendre à jouer ensemble en leur inculquant les principes de jeu tout en développant leur bagage technique.

Est-ce que l’on parle déjà beaucoup tactique à cet âge là ?

On va surtout parler de principes de jeu.

Est-ce fréquent qu’un jeune rentre au Centre de préformation à un poste et en sort à un autre ? Est-ce alors le fruit de discussions entre vous et le joueur ? On a souvent l’impression que c’est plus tard qu’il y a des replacements (par exemple Kimpembe de latéral gauche à défenseur axial, Dja Djedje de milieu défensif à latéral droit etc…)

«En U15, j'ai replacé Alec Georgen au poste de latéral droit alors qu'il avait été recruté comme joueur offensif.»

Effectivement, cela arrive. Par exemple, en U15, j'ai replacé Alec Georgen au poste de latéral droit alors qu'il avait été recruté comme joueur offensif. J'avais discuté de cette "reconversion" avec Bertrand Reuzeau et Pierre Reynaud qui partageaient la même idée. A ce poste, Alec a été sélectionné en équipe de Paris puis en équipe de France pour ensuite signer son premier contrat professionnel. Cela a été une réussite car Alec a rapidement adhéré au projet en comprenant l'intérêt de la démarche. En revanche pour certains joueurs, cela n'a pas fonctionné car ils étaient réticents dès le départ.

Chaque année, autour des terrains, on observe  des parents visiblement frustrés que leur enfant ne soit pas intégré au Centre de préformation dire qu'un élément "extérieur" a pris sa place. Comment cela se fait il que les joueurs provenant des U12/U13 du club soient peu nombreux certaines saisons ?

L'objectif du club a toujours été de recruter les meilleurs joueurs de la région pour qu'ils intègrent la préformation. Avant d'orienter le recrutement sur l'extérieur, la priorité a toujours été d'évaluer les joueurs des catégories U12 et U13 de l'école de football. Lors des 2 dernières saisons, en collaboration avec David Turon (responsable technique de l'association), nous avions mis un suivi particulier sur ces 2 catégories (réunions parents, prise en main des groupes à l'entraînement et observation des matchs). Enfin, il faut préciser que la prédiction de performance est difficile à réaliser surtout sur de très jeunes joueurs ("la vérité d'aujourd'hui n'est pas celle de demain"). 

Est-ce que l'arrivée de plus en plus précoce des agents n'a pas compliqué votre travail au fil des ans ? Est-ce pour faire face à la concurrence que de plus en plus de joueurs intègrent le Centre avec un an d’avance (surclassement) ?

«Il faut prendre en compte les agents et composer avec tout au long de la formation du joueur car bien souvent ils ont une confiance aveugle de la famille. »

Il faut prendre en compte les agents et composer avec tout au long de la formation du joueur car bien souvent ils ont une confiance aveugle de la famille. Aujourd'hui, les très bons joueurs U12 ont été identifiés par tous les clubs français et étrangers. Certains ont déjà même fait le tour des clubs et ont reçu une offre pour les 5 prochaines années. Dans certains cas, une entrée dans la structure de Verneuil avec un an d'avance pouvait être proposée. Il faut vraiment que le jeune soit mature pour que son intégration se fasse dans de bonnes conditions.

Georges-Kevin Nkoudou, Kevin Soni, Ferland Mendy (etc)... ils sont plusieurs anciens pensionnaires du Centre de préformation à être aujourd’hui pro et avoir su rebondir malgré le refus du PSG de leur ouvrir les portes du Centre de formation. Est-ce que leur trajectoire vous surprend ? Comment se fait la sélection lors de l'entrée au Centre ?

Tout d'abord, c'est toujours un plaisir d'apprendre qu'un joueur, qui n'est pas rentré au centre de formation, a réussi ailleurs. Quand on s'occupe d'un jeune pendant 2 ans, on souhaite qu'il réalise son rêve de jouer au plus haut niveau. Les exigences du centre de formation du PSG sont très élevées et le nombre de lits est restreint. Malheureusement certains joueurs n'ont pas le "niveau" nécessaire pour le club mais leur profil pourra correspondre à d'autres clubs.

Concernant George Kévin Nkoudou, il pouvait intégrer le Centre en qualité d'externe. Il a refusé car habitant dans le 19ème, cela allait être compliqué pour venir tous les jours. Kévin Soni a refusé de signer l'ANS (accord de non sollicitation, ndlr) qui lui donnait un contrat de 3 ans alors qu'il était arrivé avec un an d'avance en préformation. A la fin de saison U15, il s'est engagé avec Bordeaux. Ferland Mendy (HAC) jouait au même poste que Presnel Kimpembe. Il a fallu faire un choix qui s'avère payant puisque Presnel évolue en équipe première.

Après le départ de Sébastien Thierry, Saad Ichalalène, un ancien de la maison, s'est vu confier l'équipe U14. Pourriez nous vous décrire votre relation et les différences en terme de contenu des séances entre les séances U14 et U15 ?

J'ai apprécié de travailler avec Sébastien Thierry, d'ailleurs nous avons écrit 3 ouvrages ensemble sur les catégories U13, U14 et U15. J'ai entraîné Saad quand il faisait partie des 16 ans nationaux. À la fin de sa carrière de joueur quand il passait son BEES 1er degré, Saad était venu en stage pratique avec le groupe U15 (génération 97). L'année suivante, Bertrand Reuzeau lui a confié l'équipe U14. J'avais mis en place une planification annuelle et une programmation hebdomadaire pratiquement identiques pour les 2 catégories. La différence se situe sur le niveau technique et l'intensité.

Il y a deux ans, vous avez pris la décision de ne plus faire évoluer les deux équipes du Centre en U14 Régionaux et U15 DH et de se consacrer exclusivement à des matches amicaux et des tournois internationaux. Pourriez vous nous expliquer ce qui vous a poussé à prendre cette décision ?

«La préformation est une étape importante dans la formation du joueur. Un jeune qui n'est pas blessé s'entraîne et donc progresse davantage.»

Trois raisons nous ont poussé à prendre cette décision :

  • La volonté que les joueurs soient le week-end en famille sans contrainte de transport
  • Un championnat régional dans lequel les équipes ne cherchent pas à jouer et dont la plupart sont composées de joueurs athlétiques avec un style de jeu direct. 
  • Dans le cadre d'un master entraîneur à l'INSEP, j'avais fait une étude sur l'impact des entraînements et des matchs sur le joueur U15. Il en est ressorti qu'un joueur avait plus de chance de se blesser en match qu'à l'entrainement et que les blessures contractées nécessitaient une interruption de l'activité plus importante. 

La préformation est une étape importante dans la formation du joueur. Un jeune qui n'est pas blessé s'entraîne et donc progresse davantage.

En tant que directeur du Centre de préformation, quel est votre rôle dans le recrutement, est-ce que vous ciblez des profils particuliers ? Est-ce que ces jeunes joueurs sont forcément testés lors de tournois ? Comment arrive t’on à convaincre ces jeunes de signer au PSG et non à Lyon, au Stade Rennais ou à Monaco ?

«Aujourd'hui en France, le PSG est en concurrence avec Lyon et Monaco qui ont de sérieux atouts.»

Je travaillais en étroite collaboration avec Pierre Reynaud. A sa demande, j'allais observer des matchs et confirmer les avis de nos recruteurs sur des joueurs qui avaient été ciblés. J'assurais aussi les visites de la structure de Verneuil et je présentais le double projet aux familles avec Pierre. La dernière étape du recrutement était souvent la participation à des tournois. Pour certains joueurs, la signature se faisait avant car la concurrence était rude. Aujourd'hui en France, le PSG est en concurrence avec Lyon et Monaco qui ont de sérieux atouts. Pour être convaincants, il faut d'abord tisser des liens de confiance avec la famille, présenter un double projet clair et précis à moyen terme et se projeter ensuite sur l'équipe première. Lorsque des jeunes issus du Centre jouent en équipe première en étant performant, cela facilite la promotion du projet club.

Il y a quelques années, Bertrand Reuzeau avait confié lors d'une interview vouloir modifier la philosophie de jeu du Centre à travers notamment la réorganisation des entraînements (il avait évoqué le fait de laisser davantage de place au ballon). Est-ce que vous avez modifié considérablement vos méthodes d'entraînement ces dernières années ?

«L'arrivée de Carlo Ancelotti et de Giovanni Mauri est à l'origine de la réorganisation des entraînements.»

L'arrivée de Carlo Ancelotti et de Giovanni Mauri est à l'origine de la réorganisation des entraînements. Bertrand s'est appuyé sur Maxime Coulerot (depuis parti à Monaco) pour mettre en place un entraînement physique intégré quantifié avec les GPS. Cela permet ainsi aux joueurs de travailler toujours avec le ballon. La philosophie de jeu basée sur la possession a commencé être mise en place il y a 3 saisons par Bertrand.

Longtemps, on a malheureusement souvent entendu aux bords du terrain des personnes pointer du doigt le recrutement parisien car il était selon eux basé uniquement sur le physique ? Qu'avez vous à dire à ces personnes là ? On a l'impression que les dernières générations sont néanmoins beaucoup moins dominantes physiquement qu'il y a 10 ans

Le PSG a toujours cherché à recruter les meilleurs joueurs de la région parisienne. Le critère athlétique n'a jamais été prioritaire. Certaines générations (des 91 aux 99) ont été un peu plus athlétiques que d'autres mais la différence moyenne de taille et de poids reste minime (statistiques à l'appui). En revanche, les promotions 2000 et 2001 sont composées de joueurs talentueux en retard morphologique. Il faudra être patient avec eux car ils seront performants en U19.»

La deuxième partie de l'entretien est plus axée sur la formation et disponible ici.


Vous pouvez retrouver les commentaires de l'article sous les publicités.

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