Formé au PSG dès l'âge de 9 ans, Grégory Paisley a évolué 15 saisons au plus haut niveau, au poste de latéral gauche. Désormais consultant pour la chaîne beIN Sports, le Titi parisien est revenu pour CulturePSG sur la défaite à Dortmund, avec forcément un regard particulier sur la soirée compliquée de Nuno Mendes.
En tant qu'amoureux du PSG, quel sentiment prédomine chez vous après cette défaite 1-0 à Dortmund ?
« Avant tout de la frustration par rapport au résultat. Avec les occasions franches que tu as eues, tu te dois de marquer au moins un but. Et si tu repars avec le nul, mentalement, tu abordes le match retour d'une manière complètement différente. Entre les deux poteaux, le raté de Dembélé et les deux occasions de Ruiz, que tu peux largement mieux négocier, tu dois au moins en mettre une au fond dans un match d'une telle importance. Donc, c'est un mauvais résultat, clairement. Il y a pas mal de choses qui ont été un peu à l'envers, qui se sont mal imbriquées, dans cette rencontre. A un moment donné, on peut chercher des excuses, à expliquer l’inexplicable... Mais si tu ne fais pas un match plein en demi-finale de Ligue des Champions, ça donne ce résultat-là. Maintenant, le paradoxe, c'est qu'on a perdu, mais que je ne suis pas plus inquiet que ça pour la qualification.
Sur cette première période très compliquée, il ne faut pas oublier qu'il y a un adversaire en face. Tout le monde se focalise sur le fait que ce soit Dortmund et non le Real ou City. Mais Dortmund, c'est un habitué de la Ligue des Champions. Donc ces matches-là, ils savent les négocier, surtout à domicile. Et ils nous ont fait déjouer. On s'attendait peut-être à ce qu'ils viennent nous presser un peu plus haut et qu'ils nous laissent plus d'espaces derrière, pour qu'on puisse profiter de la vitesse de nos attaquants. Mais, ils ne l'ont pas fait. Ils ont gardé un bloc médian, voire un bloc bas sur certaines situations, pour ne pas être pris dans la profondeur. Donc, leur plan de jeu était bien défini. Et ce sont même eux qui se sont projetés rapidement, en transition rapide. Et ils nous ont fait mal. Quand tu vois le but qu'on prend, ça veut tout dire. Donc, tactiquement, on s'est fait avoir sur la première période, surtout. »
Alors qu'on s'attendait à la même organisation qu'à Barcelone, Luis Enrique a choisi de recentrer Ousmane Dembélé pour s'occuper d'Emre Can. Qu'avez-vous pensé de cette approche tactique ?
« Il ne faut pas tirer à boulets rouges sur Luis Enrique pour avoir mis Dembélé sur Can »
« C'est un choix de Luis Enrique. Alors, parfois ça marche, parfois ça ne marche pas. Mais on ne peut pas lui reprocher d'avoir tenté le coup. Tu es obligé de faire des choix sur les ressorties de balle adverses. Soit tu les obliges à venir dans la densité ou soit tu les laisses repartir par les côtés. C'est vrai que Ryerson, dans son couloir droit, a eu cette liberté de pouvoir remonter le ballon. Cela aurait pu fonctionner, sachant que Ryerson n'est pas un foudre de guerre avec le ballon.
Ça n'a pas été le cas. Mais il ne faut pas, pour autant, tirer à boulets rouges sur Luis Enrique par rapport à cette volonté de gêner Dortmund dans le coeur du jeu, en mettant Dembélé dans la zone d'Emre Can. C'est une option tactique qui se défend. Même si pour moi, Emre Can, ce n'est pas Pirlo ou Toni Kroos dans les ressorties de balle. Et donc tu aurais pu éventuellement le laisser tranquille et garder une animation défensive un peu plus classique, comme ce que propose Paris depuis quelques matches. Au-delà de ça, je pense qu'il y a eu des défaillances individuelles. A partir du moment où Ryerson est parvenu à trouver immédiatement Sancho, côté droit, ça a fait énormément de mal au PSG. »
Cette animation défensive a privé le PSG du joueur d’élimination qu'est habituellement Dembélé, sur son aile droite, une grande partie du match...
« Encore une fois, c'est une histoire de choix. Recentrer Dembélé pour les empêcher de repartir via Emre Can, ça se tient. Après, une fois que tu récupérais le ballon, c'est sûr qu'il était un peu trop axial. Mais à droite, tu avais Hakimi qui, lui, a eu le champ libre à de nombreuses reprises. Le problème, c'est qu'individuellement, on n'a pas été au top techniquement par rapport à d'habitude. Il y a eu beaucoup de déchet et de mauvais choix. À partir de là, c'est compliqué. Parce que les espaces, il les a exploités Hakimi. Sauf qu'à la sortie, il n'a quasiment jamais trouvé preneur. Pour moi, c'est un tout. Et ça va inclure aussi le fait qu'il n'y ait pas un véritable avant-centre sur le terrain à Paris. Un vrai numéro neuf comme Ramos. Quand tu as des situations de débordement et que tu as l'impression qu'il n'y a personne dans la surface, c'est problématique. »
Autre décision de Luis Enrique qui a fait beaucoup parler, le remplacement de Bradley Barcola par Randal Kolo Muani, au lieu de Gonçalo Ramos (65e). Avez-vous compris ?
« Quand tu vois que Barcola ne s'en sort pas, décale Kylian à gauche. Il aurait mangé Ryerson »
Il a estimé que Kolo Muani pouvait être impactant en sortie de banc. C'est son choix. C'est lui qui est au quotidien avec les joueurs. Il sait ce qu'ils sont capables de faire. Il est vrai que si on juge Kolo Muani sur ses dernières sorties, on est en droit de penser que ce n'était pas le bon choix. Et c'est factuel. Contrairement à Ramos qui, lui, est en pleine bourre. Maintenant, ma conviction, c'est que Mbappé est un joueur de côté. Donc remets-le à gauche, avec Ramos comme avant-centre, et on n'en parle plus. Et au moins, t'as un vrai spécialiste du poste dans l'axe, avec les bons déplacements. Parce que si on regarde bien, Hummels et Schlotterbeck, ils se sont frisés les moustaches pendant tout le match. A aucun moment, on les a mis sur le grill. Dans leur zone, on ne les a pas mis en danger. Quand tu vois que Barcola ne s'en sort pas, décale Kylian à gauche, c'est quasiment certain qu'il aurait mangé Ryerson... Maintenant, c'est toujours facile de parler. On est tous des entraîneurs dans ces moments-là. »
Les doutes sur l'implication défensive de Kylian Mbappé ont-ils pu compter dans ce changement ?
« Ça, c'est l'éternel débat sur Mbappé et ses replis défensifs. Mais je ne suis pas sûr que le mettre à gauche, pour faire rentrer Ramos, aurait mis plus en danger le PSG. Parce que Ryerson, ce n'est pas Hakimi. Et à un moment donné, tu installes un rapport de force avec ton adversaire direct. Ryerson a plus peur de Mbappé que l'inverse. Donc je pense que c'est un faux débat. C'est plus le fait de mettre ton meilleur joueur dans les meilleures conditions pour qu'il se montre performant. Et je reste persuadé que Mbappé est beaucoup mieux à gauche. Surtout quand il n'y a pas d'espaces comme mercredi. Si Dortmund était venu te chercher dans ta moitié de terrain, pas de souci. Kylian aurait pu faire mal dans l'axe, dans le dos de cette défense. Même s'il aurait fallu pour cela qu'il fasse les bons appels. Car sur ce match aller, il a trop décroché à mon goût sur les récupérations basses de Paris. Et ça a été un vrai problème. À aucun moment, on a exploité la profondeur quand on pouvait le faire. »
Hormis une frappe sur le poteau et une louche pour Dembélé, il a été peu en vue et n'a pas montré la même envie qu'à Barcelone...
« C'est pas le match le plus choquant, par rapport à son attitude, sincèrement. Parce qu'il a déjà fait bien pire. Après, c'est mieux d'avoir ce genre de comportement si tu fais la différence quand tu as le ballon. Et là, il ne l'a pas faite. Donc on tire à boulets rouges sur lui, forcément, et on parle de son implication, etc. Parce qu'à Barcelone, il ne fait pas un match extraordinaire non plus. Oui, son attitude est plutôt bonne, mais surtout il claque un doublé. Et ça efface un petit peu le reste dans le contenu. Je veux bien qu'on soit toujours focus sur Mbappé. Moi, ce que je retiens de sa prestation, c'est pas un problème d'attitude, c'est qu'il n'a pas été décisif et que c'est un non-match de sa part. Quand tu fais partie, entre guillemets, des cinq meilleurs joueurs du monde, tu te dois, dans ce genre de rencontre, d'être plus impactant. C'est surtout ça qu'on peut lui reprocher. »
Au-delà de l'action du double poteau, le PSG a manqué de réalisme en seconde période, avec notamment deux énormes situations : Fabian Ruiz, à bout portant de la tête (56e), puis Dembélé dans une position idéale face au but (81e)...
« Difficile d'en vouloir à Fabian Ruiz sur sa tête à bout portant »
Pour Fabian Ruiz (56e), c'est plus un mauvais jugement de la trajectoire du ballon. La tête plongeante n'est pas si évidente à mettre. Il faut vraiment le bon timing. Il y a un rebond et un défenseur qui est quand même là. Il aurait fallu réaliser l'action parfaite pour qu'il puisse ajuster sa tête. Donc difficile de lui en vouloir. En revanche, sur sa deuxième situation en fin de match (87e), je trouve qu'il joue mal le coup. Il voit que Hummels est battu et il sent que le gardien ne sort pas. Comme il est à l'aise techniquement, je pense qu'il a le temps de contrôler le ballon. Avec plus de clairvoyance et de lucidité, même si tout va très vite, il peut contrôler le ballon et se retrouver en meilleure position pour finir.
Mais le plus gros raté, c'est sans conteste la frappe au-dessus de Dembélé sur le service d'Hakimi (81e). Il doit au moins cadrer. C'est hallucinant. Il a fait du Dembélé. Il s'est trahi sur cette action, malheureusement pour lui. Il est capable de mettre des buts improbables et de rater des situations largement plus simples. Celle-là, seul face au but, c'est vraiment une occasion énorme. Il doit au moins cadrer, même s'il ne marque pas. Si le gardien fait un exploit, au moins, donne-toi la chance de marquer en cadrant. C'est ça qui est dommageable. Dans cette position-là, c'est pas normal. »
De l'autre côté du terrain, qui est le plus en tort sur le but de Dortmund (Füllkrug, 36e) ?
« J'ai pris le temps de revisionner le but et il faut reconnaître que Dortmund joue super bien le coup, puisqu'ils attaquent à quatre pour cinq Parisiens. Et nous malheureusement, on ne sent pas l'action venir. Au départ, Mbappé se fait éliminer par Schlotterbeck qui peut distiller cette ouverture, mais il est quand même au contact. Marquinhos qui couvre le hors-jeu ? Oui, mais Marquinhos, quelque part, il ne joue pas le hors-jeu à la base. C'est un alignement. Marquinhos est avec son vis-à-vis et il regarde le ballon. Donc, je pense qu'il est plus en position pour gérer éventuellement Brandt qui est dans sa zone.
Ensuite, Lucas Hernandez, qui est sur Füllkrug, remonte dans l’alignement et ne sent pas tout de suite le danger arriver. Parce que c'était l'un des premiers longs ballons dans le dos. Et quand il se met finalement de trois-quarts, qui est la position à adopter pour anticiper la profondeur, il est déjà trop tard. L'appel de Füllkrug est parfait, et après c'est compliqué de rattraper le coup. Et en plus, il se pète le genou sur cette action... C'est la totale et ça fait chier. Enfin, Nuno Mendes remonte sans se préoccuper de l’action. Son joueur est à l'opposé, mais il ne se donne aucune chance de pouvoir couper dans le dos de Lucas. Il est trop loin de ses défenseurs. »
En tant qu'ancien latéral gauche, vous avez dû suivre avec une attention particulière le match de Nuno Mendes qu'on a rarement vu autant en difficulté...
« Quand Nuno Mendes fait face à un joueur comme Sancho, l'écart se creuse irrémédiablement »
C'est clair qu'il est passé au travers, mais il a affronté un excellent joueur, qui a fait un très très bon match. C'est Sancho. Parfois, tu n'arrives pas à maîtriser ton vis-à-vis et ça complique les choses. Nuno Mendes a des qualités de vitesse, de puissance, qui lui permettent de compenser certains manques en tant que défenseur. Il est vraiment perfectible et gagnerait à être plus rigoureux dans son analyse des situations défensives. Quand il fait face à un joueur qui a autant de qualités de percussion et d'élimination (NDLR :12 dribbles réussis pour Sancho contre 11 pour le PSG !), l'écart se creuse irrémédiablement. Et on l'a vu, il a été en grosse difficulté. Ça reste un excellent contre-attaquant, même si mercredi, il n'a pas pu apporter offensivement. Donc, il a été bon ni offensivement ni défensivement. À partir de là, c'est une soirée à oublier pour lui.
Son positionnement en troisième central avec le ballon, ça ne doit pas l'empêcher dans la gestion de ses rencontres, de monter à bon escient. Et il l'a bien fait de temps en temps, je trouve, notamment en championnat. Une ou deux montées par mi-temps, mais vraiment tranchantes. Et après, il était plus focalisé sur son placement défensif et ça c'était bien. Il ne faut pas que ce qu'il est capable de proposer avec le ballon, ce soit l'arbre qui cache la forêt. Parce que ça reste un défenseur avant tout. Il doit te rassurer défensivement. Et moi, à chaque fois qu'il est dans une phase défensive, je ne suis pas serein. »
Il est passé tout près de la correctionnelle sur ce match aller...
« C'est vrai. En début de rencontre (14e), il met en danger tout seul le collectif sur deux mauvaises relances consécutives qui mettent le feu dans la défense. D'abord, il juge mal la situation en voulant repartir en dribblant côté gauche et Sancho lui prend le ballon derrière et sert Sabitzer. Heureusement que Donnarumma est là pour sauver le coup. Dans la foulée, le ballon revient sur lui et il tente un contrôle poitrine raté qui redonne une chance à Dortmund, avant d'écarter péniblement le danger, puisque son dégagement est contré est fini en sortie de but. C'est-à-dire que là déjà, tu aurais pu être sanctionné et être mené 1-0.
Tu peux passer au travers, pas de problème. Mais ce sont des erreurs qui se reproduisent assez souvent chez lui. Il a aussi tendance à ne pas resserrer sur son attaquant au bon moment. D'ailleurs, il est a deux doigts de provoquer un penalty, en seconde période (63e), parce qu'il pousse clairement Füllkrug dans la surface. C'est peut-être une micro-faute, mais il le pousse, alors qu'il veut ajuster sa tête. »
Est-il vraiment au point physiquement ?
« Nuno Mendes est toujours en train de reprendre ses repères et de retrouver ses sensations »
C'est un joueur qui a été absent huit-dix mois. C'est certain que tu ne retrouves pas ton niveau comme ça en deux-trois mois. C'est compliqué pour lui. Surtout sur un tel match, d'une telle intensité, et face à de tels adversaires. Donc, ça c'est un aspect, c'est sûr, qui est rédhibitoire. On ne peut pas trop lui en demander. Aujourd'hui, il se retrouve titulaire en demi-finale de Ligue des Champions. Mais, il est toujours en train de reprendre ses repères, de retrouver ses sensations. Et on aura, je l'espère, un autre Nuno Mendes à la rentrée. C'est pour ça que ne veux pas non plus l'accabler. Là, c'est juste factuel par rapport à ce qu'il a montré. Laissons-le revenir à son véritable niveau, parce que c'est vrai qu'il a eu de vrais pépins physiques. Et puis, après, on sera à même de vraiment le juger. Dans tous les cas, il a des carences défensives. Ça, c'est une réalité. Et il les compense par ses qualités physiques. »
De l'autre côté, Achraf Hakimi avait, lui, un rôle plus offensif, avec une totale liberté pour prendre son couloir. Comment jugez-vous sa prestation ?
Il est loin d'avoir été le pire. Moi, je l'ai trouvé intéressant dans son attitude. Il a toujours cette volonté de faire mal à l'adversaire. Il a une telle activité. On l'a retrouvé dans tous les bons coups offensivement. Il est tout proche de marquer et il aurait pu aussi faire marquer. Après défensivement, ça été plus compliqué. Il avait un joueur face à lui qui allait très vite, Adeyemi. Et Hakimi a aussi ce profil du latéral offensif qui compense énormément ses lacunes défensives par sa vitesse et son activité.
Au PSG, Hakimi et Nuno Mendes te mettent en danger, quelque part. Parce que ça entraîne un déséquilibre à la perte du ballon. Certes, ils sont très performants offensivement. Ce sont des contre-attaquants hors pair. Mais défensivement, dès que tu te retrouves face à des équipes qui ont de la qualité et qui savent jouer sur ces failles, tu te retrouves en grosse difficulté. Donc, c'est un parti pris. C'est un choix qui est complètement assumé. Parce que c'est une équipe qui veut ressortir court, qui veut ressortir propre, et qui se projette énormément. Donc, ce sont des profils idoines, quelque part, dans le système que veut mettre en place Luis Enrique. Mais en contrepartie, il faut accepter que défensivement, tu puisses avoir des déséquilibres et concéder des vraies situations dans les temps forts adverses. »
Qu'avez-vous pensé de la bataille du milieu de terrain, avec un Vitinha encore convaincant ?
« Il y a eu trop de déchet technique pour un tel match côté parisien »
Notre milieu ne m'a pas plus choqué que ça. Je n'ai pas vu Can, Sabitzer et Brandt prendre véritablement le dessus. C'était des débats plutôt équilibrés. Je pense que c'est plus l'impression collective de l'équipe dans son ensemble qui était en deçà de ce que le PSG produit ces derniers temps, notamment sur le plan technique. C'est plus ça qui est à mettre en avant. Il y a eu trop de déchet technique pour un tel match. C'est pour ça que je suis plutôt confiant par rapport au match retour.
Je trouve que Vitinha est régulier et constant dans la performance, qu'il soit en pointe de basse ou en relayeur. Je pense que Luis Enrique le veut en pointe basse, parce que c'est un vrai gage de sécurité dans les ressorties de balle, et il s'organise beaucoup plus vite qu'un Fabian Ruiz. Donc c'est surtout ça. Après, je suis persuadé que dans son esprit, il aimerait voir Vitinha plus haut sur le terrain aussi, mais pour cela il faudrait avoir deux Vitinha, ce qui n'est pas possible. »
Comment avez-trouvé Warren Zaïre-Emery, plus excentré qu'à l'accoutumée ?
« Warren a eu son activité habituelle, en mettant toujours autant de coeur dans tout ce qu'il fait. Il a eu des mauvais choix au moment de la frappe aussi, alors qu'il avait de meilleures solutions. C'est un manque de lucidité et de clairvoyance, parce qu'il a une grosse débauche d'énergie. Cela reflète un petit peu, je pense, l'état de fatigue de Warren. Parce qu'on lui a énormément demandé cette saison. Il a 18 ans le gamin. Tout est allé à vitesse grand V pour lui. Il est déjà indiscutable à Paris et il vient de prolonger en grandes pompes, donc il y a beaucoup de paramètres qui rentrent en ligne de compte.
Mais ça reste un très très jeune joueur. Et sur ces matches de haut niveau, je trouve qu'il répond présent à chaque fois. Il ne fait plus autant la différence qu'en première partie de saison. Car, mentalement et physiquement, il manque de fraîcheur. Il faut être réaliste par rapport à la situation. Il n'a pas été énormément ménagé. Donc, il n'y a pas d'inquiétude à avoir par rapport à ça. C'est un joueur qui est un peu moins bien, mais qui reste à un niveau très convenable dans ce PSG. »
Sorti en cours de match, Lucas Hernandez est forfait pour le reste de la saison (rupture du ligament croisé antérieur du genou gauche). Une absence qui tombe au plus mauvais moment...
« Déjà, ça fait vraiment mal au coeur de le voir blessé aussi sérieusement. Sa sortie était inquiétante, car il connaît son corps. Ça sentait pas bon et c'est bien sûr un énorme coup dur pour Paris. Lucas t'apporte nettement plus de garanties que Beraldo ou Danilo. Il a beaucoup plus de vice. Même s'il est impliqué sur l'action du but, ça reste une erreur globale, collective, par rapport à la situation. Il a aussi cette grinta et cette patte gauche dans la relance. Marquinhos et Lucas, c'est clairement la meilleure paire que tu peux avoir.
« Pas mal de Sud-Américains ont mis plus de six mois pour s'adapter à Paris. Pourquoi pas Beraldo ? »
Concernant Beraldo, il faut encore qu'il s'habitue au jeu européen. On connaît pas mal de Sud-Américains qui sont arrivés à Paris et qui ont mis plus de six mois pour s'adapter. Donc pourquoi pas lui ? C'est un jeune joueur aussi et à cet âge tout est différent. Dans la manière de défendre et dans l'aspect physique, c'est complètement différent. On sait qu'avec le ballon, il n'y a normalement aucune inquiétude à avoir. Il est très propre techniquement dans ses choix, même si parfois il pourrait se décider un peu plus tôt. Après, c'est défensivement qu'il va devoir s'étoffer un petit peu et prendre de la bouteille. Pour moi, il reste en période d'adaptation et on verra la saison prochaine.
Pour le match retour, le choix le plus logique serait d'associer Beraldo à Marquinhos, parce qu'il est gaucher et que tu devras prendre le jeu à ton compte. Mais Danilo t'apporte peut-être plus de garanties défensives. Même si ce n'est pas un défenseur central de métier et on le voit sur certaines situations de match, il est sans doute plus fiable. Et si tu privilégies l'expérience, sur un match de cette importance, ça penche aussi en faveur de Danilo. »
Qu'est-ce qui vous rend optimiste pour le match au retour, mardi prochain au Parc ?
« Sans avoir fait une prestation de haute volée, à Dortmund, il y a eu quand même eu des moments de maîtrise sur la rencontre. Il y a eu des passages où t'as senti Paris bien installé et où il a manqué ce petit but pour te mettre totalement en confiance et pouvoir gérer différemment la rencontre. Après, à partir du moment où t'es mené 1-0, c'est une autre histoire, surtout à l'extérieur. Tu t'es retrouvé le cul entre deux chaises, sans pouvoir réellement partir à l'abordage, car avec un but de retard, ça te permettait d'être toujours dans le coup sur la double confrontation. Alors que perdre 2-0 aurait modifié complètement la donne pour le match retour, en t'obligeant à lâcher les chevaux d'entrée.
Maintenant, mardi prochain, que tu démarres à 0-1 ou 1-1, il fallait mettre ce petit but quoiqu'il arrive au retour. Donc, il faudra faire le nécessaire et essayer de produire ce que tu produits depuis pas mal de rencontres pour leur mettre le feu avec un Parc en fusion. Car même en ayant été collectivement et individuellement en demi-teinte sur ce match aller, t'as réussi à exister, en fait. T'as pas senti Dortmund vraiment un cran au-dessus, hormis cette gestion compliquée du cas Sancho. Est-ce que Donnarumma a été mis énormément à contribution ? Non, loin de là. Il a eu deux-trois arrêts importants à faire. C'est pour ça que je me dis qu'on est en capacité de renverser la vapeur sans aucun problème, à condition d'être dans une forme optimale. Et ça, si tu n'es pas capable de l'être sur une demi-finale retour de Ligue des Champions, à la maison, c'est que t'as rien à faire à ce niveau de la compétition et encore moins en finale. »
Quelle onze doit aligner Luis Enrique pour aller chercher cette qualification ?
« Je mettrais : Donnarumma – Hakimi, Marquinhos, Danilo, Nuno Mendes – Zaïre-Emery, Vitinha, Fabian Ruiz – Dembélé, Ramos, Mbappé.
« A la place de Lucas, je choisirais Danilo pour son expérience »
Derrière, entre Danilo et Beraldo, c'est du 50-50, mais je choisirais Danilo pour son expérience. Au milieu, je laisserais Fabian Ruiz. Je sais qu'il a été beaucoup critiqué pour sa performance à Dortmund. Mais moi, je l'ai trouvé plutôt actif dans ce milieu de terrain, il s'est projeté dans la surface. Et puis il t'apporte quand même un équilibre défensif. Parce que tu pourrais jouer la carte offensive et mettre un Asensio, ou même un Lee (même si je le préfère sur l'aile droite), à sa place. Mais tu te dois de garder un certain équilibre aussi avec un seul but de retard. Et devant, je mettrais Dembélé à droite, Ramos en pointe et Mbappé à gauche. Avec Barcola en supersub, mais aussi Asensio et Kang-in Lee, si tu dois jouer ton va-tout. »
Gonçalo Ramos pourait donc être le facteur X de ce PSG-Dortmund...
« Être le facteur X, non. Car, ce sera vraiment l'aspect collectif, le facteur X. Si tout le monde est à son niveau, je pense que ça va faire la différence. Donc, je ne cible même pas un joueur en particulier. Mais il est vrai que Ramos peut t'apporter des choses différentes. Je pense à toutes les fois où tu vois Hakimi déborder, lever la tête et ne peut pas pouvoir centrer, et du coup, faire un crochet pour revenir à l'intérieur. Après, ça fait partie de l'animation offensive de Luis Enrique. Donc, difficile de juger aussi. Ce sont des choix à faire dans l'aspect tactique. Et ça a fonctionné jusqu'à aujourd'hui. Maintenant, face à un bloc bas et si tu es en situation de centrer, Ramos peut te débloquer des situations. Bien sûr, Dortmund, ce n'est pas le Havre, sans faire injure au Havre. Mais en tout cas, face au bloc bas du Havre, Kang-in Lee a pu trouver Ramos avec cette tête magnifique.
« Si tu arrives à servir Ramos dans de bonnes conditions, ça peut sentir bon pour Paris »
Ça prouve que c'est un joueur de surface. C'est ton seul véritable numéro neuf, racé, qui attire les ballons et qui est capable d'avoir quasiment le geste juste à chaque fois qu'il a une occasion. Je ne dis pas qu'il marquera ou pas, mais au moins, il t'offre cette possibilité supplémentaire de marquer. Et si tu arrives à le servir dans de bonnes conditions, ça peut sentir bon pour Paris. J'imagine le scénario au retour, avec un bloc bas de Dortmund qui va essayer de faire mal en contre avec Sancho et Adeyemi. Donc, à nous d'avoir un bon équilibre. En tout cas, dans l'utilisation du ballon, il ne faudra pas se tromper, parce que sinon, on n'ira pas en finale. »
Pour finir, parlons un peu de vous. Votre reconversion est totalement réussie, avec ce rôle de consultant sur beIN Sports, où vous commentez la Serie A aux côtés de Philippe Genin.
« En 2012, quand j'arrête ma carrière, je n'étais pas prédestiné à ce rôle et à ce métier. Je m'estime privilégié, parce que j'ai quand même réussi à rester dans le milieu du football, indirectement, et c'est super agréable. En plus, j'ai l'impression de ne commenter quasiment que des gros matches. Donc, c'est encore mieux. C'est un vrai kiff. J'avais peur d'être redondant au bout de dix ans. Car c'est évident, à un moment donné, tu ne peux pas inventer. Mais tu peux te renouveler sur certaines situations.
Parallèlement, j'ai passé mon diplôme de manager général à Limoges. Parce que j'aimerais aussi intégrer un club pro. Je pense avoir l'oeil et des idées, notamment pour le recrutement. J'ai quelque chose à apporter dans une structure pour faire la passerelle entre l'administratif et le sportif. J'ai besoin que ça se sache, mais je ne veux pas faire les choses n'importe comment, mais plutôt en bonne intelligence. Je ne vous cache pas qu'il y a des clubs qui restent peut-être inaccessibles, comme le PSG. Même si pour moi, tu n'as jamais assez de regards différents et compétents... Quand c'est ton club de coeur et que tu as envie d'y participer, ça serait une belle histoire. Mais c'est très compliqué maintenant.
J'attends un bon projet et on verra bien. Il y a peu de places. C'est un peu le jeu des chaises musicales aussi. Il y a toujours cette crainte chez les gens en place qui se disent « J'ai peur pour mon poste ». C'est comme ça que ça fonctionne. C'est le monde du travail. Mais bon, je ne me prends pas la tête. Je suis bien chez beIN Sports. Ça fait plus de six ans maintenant qu'on commente le championnat italien avec Philippe Genin. Il y a une complicité qui s'est installée. Chacun est à sa place et je trouve que notre duo fonctionne bien. Donc j'imagine que ça se ressent pour le téléspectateur, même si je ne lis pas ce qui peut se dire sur les réseaux sociaux. Je suis plus dans l'information. C'est ça qui m’intéresse. »
Propos recueillis par Numéro 10
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