La sortie de Pastore en 3 questions

Pastore était-il cuit ?

La dernière image de Pastore avant sa sortie est celle ci-dessous. Sur une touche parisienne, Martial s’apprête à entrer pour Monaco et le changement parisien va suivre. Le joueur argentin ne sait pas encore qu’il va sortir et on le voit alors penché en avant, en pleine récupération, seul joueur sur le terrain avec cette posture :

Moins visible que cette vision forte d’un joueur au bout du rouleau, il y a pourtant quelques minutes plus tôt une autre scène qui montre que Pastore n’y est plus trop. On joue alors la 73ème minute et Monaco a une touche dans le camp adverse. Pastore fait l’effort de venir presser sur le côté :

Monaco joue en retrait et on voit le joueur souffrir pour se replacer dans l’axe, regardant ses chaussures plus que le ballon :

Sauf que Monaco repart du même côté, avant qu’il ne se replace réellement. Le ballon est à ce moment-là assez proche de lui mais le joueur n’en peut plus, épuisé, et part presser en marchant :

Le latéral ne l’attend pas et l’action se développe vers le camp parisien. On voit toujours Pastore en train de marcher, impuissant, comme Lucas et Cavani :

Le ballon avance dans le camp parisien et il est désormais loin. Lucas marche, lui aussi et seul Bahebeck accompagne l'action parmi les attaquants parisiens :

L’action va jusque dans les 18m côté droit et est suivi d’un long centre au 2ème poteau. Lucas, inactif comme Pastore au début de l’action, est pourtant venu arracher le ballon dans les pieds de Kurzawa qui l'avait récupéré au poteau de corner. Il repart en contre balle au pied et a plusieurs Monégasques à ses trousses. On retrouve alors Pastore pratiquement à l’endroit où on l’avait laissé 20 secondes plus tôt. Cavani s’est remis en route sur le côté droit et seul Javier n’a pas pu faire l’effort au départ, sans le ballon :

Une fois l’action enclenchée, il se remet en jambes et court, comme le reste de l’équipe, pour quelques secondes au moins. L'action se finit un peu plus loin sans réel danger et le changement a lieu plus ou moins dans la foulée.

Sur cette séquence, il reste que le joueur a abandonné toute la partie sans ballon de son jeu, de façon plus marquée que les autres offensifs (Lucas finit très bien le match dans ce domaine d’ailleurs). S'il existe encore dans le jeu avec ballon, cela signifie qu'il n'est actif que pendant la moitié du temps de jeu.

Sa sortie a-t-elle fait reculer le PSG ?

Là encore, l’action avant sa sortie montre un PSG récupérant le ballon dans ses 6m. Les Monégasques arrivent lancés depuis l’arrière vu que le premier rideau défensif n'existe plus et le duo Matuidi/Motta se prend vague sur vague depuis un certain temps. Pendant quelques minutes, juste avant l’ouverture du score, ils ont enfin réussi à récupérer le ballon haut, mettant ainsi en danger Monaco. 

Malheureusement, ils n’y arrivent pas forcément tout le temps et la fatigue se fait aussi sentir pour eux, notamment Matuidi. A ce moment-là, Blanc fait rentrer Cabaye pour renforcer la digue. Si le joueur n’a pas la vista offensive de Pastore, il permet au moins d’éviter à Monaco de se retrouver aux 30m sans difficultés. D’entrée, on le voit assurer un pressing que Pastore n’arrivait plus à faire et oblige les Monégasques à reculer :

Dans les 5 minutes après le changement, ce n’est pas Pastore ou Cabaye qui change quoi que ce soit, ce sont les défenseurs qui décident de jouer bas. Sur les contres, ils ne remontent plus et restent à 35m maximum de leurs buts, à l’image de ce que faisait Monaco en 1ère mi-temps. Motta et Matuidi arrivent encore à accompagner les offensives mais le PSG se disperse sur la pelouse quand il attaque. Au contraire, on voit un bloc à peu près cohérent sur les phases défensives.

Sur les rares opportunités que le PSG a de construire, Motta notamment se montrant disponible, on voit par manque de lucidité des grands ballons en avant pour se débarrasser de la balle, tel David Luiz sur cette action :

Et sur la dernière action en faveur de Monaco, à la toute fin du temps additionnel, on a l’illustration des problèmes de la défense si elle avait voulu jouer haut. Monaco a perforé le milieu avec ses joueurs rapides et se retrouve en situation de 5 contre 5, validant en partie le choix de la défense de jouer bas :

On a également entendu que Pastore aurait gardé le ballon mais il y a 2 objections à cet argument. Tout d’abord, comme montré sur l’action avec le ballon long de David Luiz, les Parisiens n’ont pas voulu construire lors de ces 15 dernières minutes, préférant attendre et contrer plutôt que de construire. Le jeu a été très haché pendant cette période et chaque fois que Paris a eu l’opportunité de faire un temps de jeu long, il ne l’a pas fait. Le pressing haut monégasque paraissant dangereux, les défenseurs ont systématiquement sollicité les attaquants au loin plutôt que les milieux.

L’autre objection vient du jeu de Pastore : sur le match, il est le joueur qui a perdu le plus de ballons. Son jeu est fait de prise de risque, c’est ce qui le rend à la fois si intéressant et si vulnérable. Comment espérer d’un joueur fatigué et donc moins lucide qu’il transforme sa façon de jouer pour devenir d’un coup le pondérateur du jeu parisien ? Même Motta, baromètre de l’équipe, n’a pas su le faire, se permettant encore des courses vers l’avant à la 85ème minute ou des dribbles dans sa moitié de terrain.

Etait-il le joueur à sortir ?

Outre la partie physique déjà abordée dans l'analyse du match, il faut également prendre en compte les remplaçants possibles. Il y avait six joueurs encore disponibles sur le banc, cinq en enlevant Douchez. Parmi ces cinq, on trouve Digne et Aurier, pas idéal pour un changement poste pour poste, ou Augustin, 0 match pro au compteur. Reste alors deux solutions : Cabaye et Chantôme, deux joueurs avant tout axiaux. Si l’idée de sortir Pastore plutôt que Lucas ou Cavani se discute, l’identité des remplaçants fait clairement pencher la balance vers l’Argentin. Il est, malheureusement pour lui, le seul avec des remplaçants capable d’évoluer à son poste, ou au moins dans sa zone.

Dans une logique de possession, on aurait plutôt fait sortir Lucas, autre joueur dont le jeu est générateur de pertes de balle. Mais, à partir du moment où le PSG ne veut plus de la possession, faire rentrer Cabaye ou Chantôme, joueurs travailleurs, est un choix valable. Vu que la défense souffre et que l'axe est plus sollicité que les côtés, le choix de sortir le milieu axial se défend d'autant plus. Lucas, bien plus en vue en fin de match, justifie même plutôt bien le remplacement de Pastore plutôt que le sien. Reste la possibilité de sortir Cavani mais c'est un des meilleurs joueurs de tête de l'effectif et Monaco pouvait s'appuyer sur les coups de pieds arrêtés comme arme.

Pastore se retrouve donc dehors parce qu'il est cuit, parce que les autres le sont peut-être un peu moins et parce qu'il a le profil le plus simple à remplacer, surtout vu les circonstances.

En conclusion, la sortie de Pastore n’a bien évidemment pas rendu service à l’équipe vu le match du joueur, tout du moins quand il était encore en forme. Malheureusement pour lui, le joueur était visiblement très fatigué. Et alors que les déclarations de Blanc après le match nous avaient paru fallacieuses, sa sortie n’est d'ailleurs pas forcément l’élément qui a fait basculer le match. Le découpage des séquences de fin montre un refus de jeu du PSG motivé en premier lieu par ses défenseurs, tant dans le placement que dans l’utilisation du ballon. Sur le dernier quart d’heure, le manque de lucidité de toute l’équipe est assez visible et le but encaissé l’illustre d’ailleurs plutôt bien. Alors, quand on prend en compte que le jeu sans ballon devient plus important que le jeu avec, faire sortir Pastore pour un joueur frais n’a rien de fou. Au contraire, cela répond même plutôt à la logique collective du moment.