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Cavani face au gratin des avant-centres, vu par les stats (Partie 2)

Publié le vendredi 24 août 2018 à 13:19 par Thibaut B. / ParisStatsGermain.fr
Nous avons vu dans la première partie de cet article consacré aux statistiques de Cavani, mises en relation avec celles d’un échantillon de onze avants-centres de classe mondiale, que l’Uruguayen pouvait être considéré comme le ou l’un des meilleurs finisseurs de la planète football. Nous allons maintenant voir dans cette seconde partie que dans les phases de jeu non liées au but en lui-même, il éprouve plus de difficultés.

La première partie est disponible ici.

Participation minimale au jeu collectif

Cavani n’est pas réputé pour sa capacité à créer du jeu ou apporter du liant dans le jeu collectif de sa formation. Les stats relatives à la passe et les comparaisons avec notre échantillon de buteurs confirment cette réputation. 

Avec 16 passes en moyenne par match, Cavani se classe 10ème sur 11 de notre panel de buteurs (seul Icardi fait moins bien avec 13). Cela confirme sa faible participation au jeu même en la comparant à des buteurs comme lui. La moyenne de notre échantillon est en effet à 22 passes par match, soit 27 % de plus que Cavani. L’écart avec les attaquants qui participent le plus au jeu comme Suarez ou Firmino est même colossal puisqu’ils exécutent en moyenne 32 passes par rencontre, soit le double de Cavani. 

Si l’on rentre dans le détail du type de passes, cette tendance se confirme puisqu’avec 0.6 passe longue par match Cavani en réalise moitié moins que la moyenne de notre panel (1.2). Kane en fait 2.3 par match. Par ailleurs, l’an passé en Ligue 1, Cavani n’a réussi aucun centre (sur 13 tentatives). Il est le seul dans ce cas-là avec Lewandowski (sur 15). On notera cependant que seuls Firmino et Lukaku s’excentrent un peu et réalisent plus d’un centre par rencontre en moyenne. 

En revanche, avec plus de 80 % de ses passes réussies, Cavani fait preuve d’une belle maîtrise technique et se classe 3ème de notre groupe de buteurs. Le meilleur dans cet exercice étant Aguero avec 83 %. 

Cavani moins dribbleur que la moyenne des buteurs

Autre secteur de jeu où l’attaquant parisien présente des statistiques moins importantes que ses collègues buteurs : le dribble. Cavani est en effet, après Icardi (encore une fois), celui qui en tente et en réussit le moins en moyenne par rencontre : 0.5 dribble réussi et 0.8 tenté alors qu'en moyenne notre panel est respectivement à 1.1 et 2. 

Pourtant, comme pour la passe, dans ce domaine également il fait plutôt preuve d’une bonne réussite (58 % alors que la moyenne est à 53 %). 

On notera qu'Aguero et Suarez se distinguent nettement avec plus de 3 dribbles tentés par match et que l’attaquant de City, avec 2.2 dribbles réussis en moyenne par match en réussit le double de la moyenne de notre échantillon. 

Firmino est celui qui a le meilleur taux de réussite dans cet exercice (67.1 %) où les écarts entre les joueurs sont très importants avec quatre joueurs au-dessus de 60 % (Firmino et Aguero 67 %, Dzeko 65 %, Lukaku 61%) mais aussi deux joueurs en-dessous de 40 % (Lewandowski 30 % et Suarez 38 %). Suarez rate à lui seul plus de dribbles par match (1.9) qu’Icardi et Cavani n’en tentent à eux deux ! 

Cavani commet presque autant de fautes qu’il en subit

En corollaire de sa moindre propension à provoquer balle au pied, Cavani est moins victime de fautes que la moyenne de notre échantillon (0.6 contre 0.9). C’est son compatriote Luis Suarez qui en subit le plus (1.5 par match). 

C’est le brésilien de Liverpool Roberto Firmino qui en commet en revanche le plus (1.5). Sur le total de sa saison en championnat, cela représente pas moins de 57 fautes commises et tout ceci sans avoir pris le moindre carton jaune !

Ils sont d’ailleurs étrangement trois buteurs à commettre plus de fautes qu’à en subir :  Firmino (57 vs 18 !), Lukaku (31 vs 16) et Dzeko (37 vs 28). Seuls Higuain et Immobile en subissent nettement plus qu’ils n’en commettent, ce qui paraît pourtant assez logique pour des attaquants. On ne sera en revanche pas surpris de noter que c’est le très mordant Suarez qui a pris le plus de cartons jaunes (9). 

Cavani pas plus défenseur que la moyenne

Les données statistiques concernant les aspects défensifs, pour lesquels on aurait pu s’attendre à ce que l’attitude très généreuse de l’Uruguayen le distingue des autres buteurs, n’ont pas confirmé la réputation de Cavani. En effet, que ce soit en matière de tacles, de dégagements ou d’interceptions, il se situe dans la moyenne de notre échantillon. C’est le Brésilien Firmino qui sort considérablement du lot dans ces aspects défensifs avec notamment 3.1 tacles tentés par match (avec 115 tacles sur la saison, il a tenté le tiers du total cumulé des tacles des 11 attaquants de notre échantillon !). A l’inverse, Icardi et Lewandowski sont ceux dont l’activité défensive est la moins recensée par les statistiques. 

En synthèse, ces statistiques comparatives nous indiquent donc que Cavani est certes un buteur d’exception, mais qu’il apparaît moins performant que d’autres buteurs dans les domaines de la passe et du dribble. Même en le comparant à d’autres grands buteurs, El Matador apparaît bien comme un finisseur hors pair. Cependant ses carences techniques limitent son champ d’action sur le terrain alors que ce n’est pas forcément le cas des autres attaquants. 

Au global, ses qualités de buteur primant néanmoins, l’évaluation chiffrée réalisée par le site Whoscored classe Edinson Cavani au 3ème rang de notre panel avec le rating de 7.69, derrière Sergio Aguero (7.81) et Luis Suarez (7.72). 

Trois styles d’avants-centres

L’analyse des différentes statistiques réalisée dans cette étude a permis de mettre en évidence des styles différents d’avants-centres. Il y a bien plusieurs façons d’être un avant-centre performant dans les grands championnats européens. Avec le graphique ci-dessous, nous avons tenté de cartographier ces différents styles en classant les onze attaquants de notre étude selon deux critères uniquement : le nombre de buts par match (hors pénalty) et le nombre de passes par match. 

Trois grandes catégories peuvent alors être distinguées :

  • Les « buteurs participatifs » : on pourrait dénommer ainsi Suarez, Aguero et Immobile car, à leurs indéniables qualités de finisseur (ils sont tous au-dessus de 0.66 but par rencontre, soit en moyenne 2 buts en 3 matches), ils ajoutent une importante participation au collectif (au moins 23 passes par match en moyenne). Avec 0.7 but par match hors pénalty et près de 32 passes en moyenne par rencontre, Luis Suarez est le symbole de ce type d’avant-centre à la fois très fort buteur et acteur majeur de l’élaboration du jeu de l’équipe (avec de nombreuses passes décisives à la clé).
  • Les « buteurs exclusifs » : Lewandowski, Kane, Cavani et Icardi sont les représentants de cette catégorie. Ce sont également des finisseurs d’exception mais leur contribution au jeu collectif de leur formation est réduite à son strict minimum (moins de 20 passes par match et très peu de passes décisives). Le Polonais est toutefois un peu à part car il s'agit de sa première saison sous la barre des 20 passes/match en Bundesliga
  • Les « avants-centres collectifs » : Firmino, Dzeko, Higuain et Lukaku appartiennent à cette dernière catégorie qui emprunte un peu à chacune des deux premières. Ce sont de bons buteurs (mais pas exceptionnels : moins d’un but tous les 2 matches en moyenne) mais surtout, ils constituent un point d’appui au collectif de leur équipe. Leur moyenne de buts est bien moindre que celle des autres mais leur nombre de passes témoigne d’une plus grande participation à l’élaboration des attaques de leur équipe. Firmino, qui en outre apporte un sens du sacrifice important par son activité défensive, constitue l’archétype de cette catégorie.

On vient de le voir, Cavani appartient lui à la catégorie des buteurs exclusifs. Il en est même le parfait symbole. Dans ces conditions, remplacer l’Uruguayen par un autre attaquant, comme cela trotte a priori parfois dans la tête des dirigeants parisiens, constituerait une énorme perte pour l’attaque parisienne en terme de volume de buts. A la question « par qui le remplacer ? » le cas échéant, il ne semble pas y avoir de bonne réponse puisque les joueurs capables de marquer autant que lui semblent ne pas exister. Le remplacer par un joueur au profil similaire serait sans effet sur le jeu collectif. Le remplacer par un joueur d’une autre catégorie représenterait forcément une perte en nombre de buts que l’apport au jeu collectif n’est pas certain de combler. Donc, au final, il semble vain de se demander pourquoi chercher à le remplacer…

En outre, plutôt que de le comparer à Neymar ou Mbappé et ainsi de stigmatiser les écarts de niveau technique, il paraît plus judicieux de le situer par rapport aux autres attaquants de classe mondiale et de considérer qu’il est plutôt, par sa faculté à scorer sans cesse et à ne s’intéresser qu’au but, le parfait complément de ses deux compères d’attaque et le joueur idoine pour le PSG actuel.

Des stats différentes en Coupe du Monde

On terminera cet article avec une note supplémentaire d’optimisme en jetant un œil aux stats de l’ancien Napolitain durant la dernière coupe du monde. 

Même s’il ne faut pas tirer trop d’enseignements de quatre matches avec la sélection nationale, il apparaît clairement que durant cette compétition le Cavani de l’Uruguay a eu un jeu différent du Cavani Parisien. Et toutes les lacunes pointées du doigt précédemment dans cet article y sont gommées ou presque. Cela voudrait dire que le potentiel de joueur complet, ou de « buteur participatif » pour reprendre notre typologie précédente, est là et qu’il ne demande qu’à s’exprimer.

Ses stats à la passe, ci-dessus, témoignent en effet d’une plus grande participation au jeu avec sa sélection nationale : 22 passes par match contre 16 avec le PSG l’an passé. Avec 22 passes, Cavani se situerait dans la moyenne de notre panel d’attaquants, et non plus en fin de classement dans cette catégorie statistique. Ce plus gros volume de jeu ne s’accompagne d’ailleurs pas d’un plus grand déchet technique puisqu’il conserve le même pourcentage de réussite dans ses transmissions (un peu plus de 80 %).

Le constat est le même pour les dribbles puisqu’il affiche une moyenne étonnante de 1.8 dribbles tentés par match durant la World Cup, contre 0.8 avec Paris la saison passée. Il n’a d’ailleurs raté aucun des 7 dribbles tentés lors de ses quatre rencontres du Mondial. 

Alors, comment expliquer ces différences de statistiques entre le Cavani du PSG et celui de l’Uruguay ? Les besoins de l’équipe ? Le style de jeu de ses partenaires ? La confiance en soi ? Sûrement un peu de tout ça. Charge à Thomas Tuchel de trouver les mots et les combinaisons tactiques pour permettre à l’Uruguayen de s’affirmer pleinement comme le joueur complet qu’il peut être afin de faire taire ses détracteurs.  


Vous pouvez retrouver les commentaires de l'article sous les publicités.
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