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[Interview CulturePSG] Echouafni : «L'idée était d'entrer dans un nouveau cycle» (1e partie)

Publié le samedi 15 décembre 2018 à 19:50 par Bruno Hermant
Avant la rencontre de championnat entre le PSG et le FC Metz comptant pour la 14e journée de Division 1, dernier match de l'année civile 2018, nous avons rencontre Olivier Echouafni au centre d'entrainement des féminines. Avec ce dernier, nous avons évoqué la première partie de saison du PSG dans un long entretien effectué sous forme de bilan.

Avant de démarrer sur la saison, nous aurions aimé revenir sur votre arrivée au club. Comment se sont noués les contacts ? Vers quelle période ? Quelle était votre vision sur l'effectif du PSG ? A-t-il fallu attendre véritablement la signature du contrat pour commencer à travailler sur l'effectif ?

« En fait, tout s'est fait assez rapidement malgré tout. J'avais des contacts avec des clubs masculins, notamment dès les premiers mois de l'année. En aucun cas avec le PSG, comme j'ai pu le lire dans la presse. Je n'avais pas eu le moindre contact avec le PSG durant cette période. Avec le club, la prise de contact a été effectuée vers la fin du mois de mai, au début du mois de juin, tout au plus. À ce moment-là, j'étais en contact avec d'autres clubs. Quand le PSG m'a proposé le poste, j'ai pris le temps de réfléchir sur le projet. Finalement, je me suis vite décidé. Pour la bonne raison que j'avais l'impression de ne pas avoir fini ma mission avec les féminines de l'équipe de France, avec qui cela s'était terminé beaucoup trop rapidement. J'avais le besoin d'aller au bout des choses. Qu'y avait-il de plus que d'être contacté par le PSG en termes d'ambition, d'exigence, de haut niveau, de ce que j'attendais réellement ? 

À partir du moment où les contacts se sont noués, nous avons commencé à travailler sur le fond et la forme de l'effectif. Avec un avantage me concernant, je connaissais déjà très bien l'effectif du PSG. Il y avait déjà quelques joueuses de l'effectif que je connaissais pour les avoir dirigées en équipe de France. Mais aussi les étrangères puisque l'équipe de France rencontre les meilleures nations du monde et forcement, les joueuses du PSG qui en font partie ont été très souvent observées. Je pense que pour le club et pour moi, c'était un bon atout de connaitre une très bonne partie de l'effectif, à 80/90%.

À partir de ce moment, nous nous sommes mis au travail. Trois semaines après la première prise de contact, j'ai signé mon contrat avec le PSG. Cela a pris beaucoup de temps, pour diverses raisons qui provenaient surtout du club. J'avais d'autres contacts, on sait toujours que tant qu'un contrat n'est pas signé, il peut se passer des choses. Mais j'ai fait vraiment abstraction de cela, nous avons travaillé avec Bruno Cheyrou (NDLR Directeur sportif de la section féminine). Il y avait déjà des dossiers enclenchés depuis un certain temps, l'effectif a été mis en place, mais beaucoup de choses se sont faites tardivement.» 

Pour revenir sur le recrutement, était-ce prévu de laisser partir autant de cadres d'un coup ? Fallait-il régénérer autant l'effectif d'un coup ? 

« L'idée était d'entrer dans un nouveau cycle. Les cas bien spécifiques des joueuses sont passés au crible. Nous avions des joueuses qui avaient la trentaine d'années passées. Il fallait mettre un peu de fraîcheur, de nouveauté dans le groupe. Cela a été la direction prise par le club, je me suis adapté à ces idées de départ. Après, effectivement, nous avons perdu des filles qui avaient beaucoup d'expérience. Cela nous a joué des tours dans cette première partie de saison, on sait très bien que quand on est jeune, on est capable de faire de très belles choses, mais aussi de moins bonnes par moment. C'est la jeunesse...

En même temps, c'était l'objectif d'entamer un nouveau cycle et de la fraîcheur dans ce groupe, en reconnaissant bien entendu tout le travail qui a été effectué avec ces joueuses-là. Quand on perd Laure Boulleau, Laura Georges, Marie-Laure Délie, Erika, puis Vero Boquete, Shirley Cruz, Sabrina Delannoy, Cristiane les années précédentes, que des filles confirmées... Cela ne paraît pas, mais ce sont des éléments prépondérants de cette équipe qui sont partis. Du coup, oui, c'est un nouveau départ pour le club, sachant qu'il veut rester ambitieux.

Aujourd'hui, peut-être que ces filles nous manquent un peu. Dans le recrutement, il fallait aussi faire le point avec les joueuses extracommunautaires. Cela concernait Erika principalement. Le club avançait déjà sur l'arrivée de Wang Shuang, celle de Daiane était déjà dans les tuyaux et Formiga allait revenir. Il a fallu faire un choix avec Erika, nous nous sommes posé la question. Elle a compris notre idée.» 

Le recrutement des joueuses qui sont arrivées, qui sont pour la plupart de jeunes internationales, s'est déroulé plutôt tardivement. Notamment l'arrivée d'Hanna Glas qui arrive le dernier jour du mercato. Comment prépare-t-on une saison avec une grosse partie de l'effectif qui n'est pas encore présent ?

« Dans un premier temps, on s'adapte. Nous sommes partis en tournée aux États-Unis avec 17 joueuses seulement, dont 3 de 15 à 18 ans qui n'avaient pas connu le haut niveau. Quand vous vous retrouvez face à certaines des meilleures formations du monde, Manchester City, North Carolina Courage, Lyon et consorts... Vous vous dites qu'il faut que l'on soit prêt pour la première journée de championnat. On est toujours noté sur les résultats. Mais au vu de la situation, nous avons fait abstraction de cela. On part en tournée alors que nous n'avons que cinq jours d'entrainement dans les jambes, aucun travail foncier de fond. Il y avait tous les éléments pour prendre des roustes à chaque match. On a fait une superbe tournée. Nous n'avons pas gagné de match durant cette tournée, mais nous avons progressé au fur et à mesure des rencontres. Nous avons fait trois matchs, rencontré deux fois Manchester City.

Le premier match, je ne l'ai pas compté, on affrontait City et son équipe type. Notre objectif était de revenir à Paris sans aucune blessée, c'était ma priorité de la tournée, mission accomplie. Le groupe a été exceptionnel avec tous les éléments compliqués à gérer, comme la température, le décalage horaire, le peu d'entrainement foncier dans les jambes. Quand vous avez des joueuses de l'effectif qui constatent qu'il n'y a que 15 joueuses, avec tous ces départs, il peut y avoir une forme d'inquiétude, je peux les comprendre. Je ne l'étais pas. Je souhaitais surtout qu'elles ne perdent pas confiance. On perd contre City 1-0 dans une rencontre qui peut largement se terminer sur un match nul 1-1, puis 2-1 dans une rencontre qui se joue sur coup de pied arrêté. On rencontre North Carolina, on perd 2-1 de très peu. Le club avait décidé de faire une préparation de très haut niveau, face à des équipes de grande qualité. On a fait 7 matchs, même moi, je n'ai pas eu de préparation équivalente durant ma carrière. On a rencontré City, North Carolina, le Bayern, Arsenal, l'Atlético...

À Toulouse, on fait deux matchs nuls contre le Bayern et Arsenal en cassant une spirale de défaites, puis on termine sur deux victoires lors de la tournée au Pays basque. Cela a été crescendo. Les filles ont été remarquables de bout en bout ! J'ai beaucoup fait jouer des filles, énormément. J'ai eu peur que nous ayons de la casse au niveau de l'effectif. Très peur. Tout le monde a fait un travail remarquable, notamment le staff médical. Les joueuses ont été exemplaires. C'était pour moi déjà une très bonne base de travail.

Bien sûr, on attendait des recrues, moi, les joueuses. Elles sont arrivées tardivement, notamment Wang, qui a été sélectionnée avec la Chine pour les Jeux Asiatiques, sur des dates non FIFA. Pour son intégration, cela a pu être compliqué. On comptait sur le retour de Formiga mais à quel moment ? Dans quel état allait-elle revenir ? Nous n'avions aucune certitude. Daiane est une jeune joueuse en défense centrale, avec peu d'expérience. Puis Bruun et Zamanian tardivement et Glas le dernier jour. Zamanian remplaçait le profil de Kenza Allaoui, blessée lors de la tournée de Toulouse. Le premier match me faisait très peur. Jouer à Fleury avec Wissem Bouzid et Naomie Vagre, deux jeunes joueuses qui n'ont pas un seul match de D1 dans les jambes, avec un effectif incomplet. Je sais que nous n'avons pas le droit à l'erreur dans ce championnat. C'est terrible.» 

Pour en terminer sur le recrutement, y'a-t-il des joueuses que le club n'a pas pu recruter, pour diverses raisons ? On peut penser notamment à la Danoise Nadia Nadim.

« Sur certains cas, oui. Nous avons eu des joueuses qui ont été bloquées par le club. C'est la particularité du football féminin, très peu de transferts encore, donc il faut que la joueuse arrive en fin de contrat pour que l'on puisse discuter avec elle. Soit parce que la joueuse ne voulait pas partir, elle voulait rester dans son club, dans son confort de vie.

C'est un des axes sur lequel le PSG doit travailler. Il faut que le club puisse faire comprendre à ces joueuses que le PSG est un grand club. Montrer à ces joueuses que le PSG est un club ambitieux. Mais surtout un club accueillant, un club où on se sent bien. Aujourd'hui, on veut vraiment améliorer l'image du PSG. Cela passera aussi par tout ce que nous faisons aujourd'hui, dans l'approche, la compétitivité, l'ambition, la volonté de vouloir rester au top. Cela n'empêche pas de faire la part des choses, d'être sur le terrain et de prendre du plaisir. C'est un métier exceptionnel, je suis bien placé pour le savoir, être sur le terrain, face aux difficultés que l'on peut observer dans la rue, on n’a pas le droit de se plaindre.»

Abordons le championnat, le PSG a entamé le championnat par une belle série de victoires : une très très compliquée contre Fleury, puis de larges victoires qui ont mis un peu de temps à se dessiner (Soyaux/PFC), puis Montpellier où le PSG fait un match très bon, jusqu'à l'épisode de Lille. Était-ce véritablement le premier match contre Fleury ou le double affrontement PFC/Montpellier qui a fait office de charnière dans ce début de saison ?

« C'est un peu l'ensemble. Fleury, je n'ai pas vraiment de repères. On ne sait pas vraiment où on en est, où va-t-on se situer, sans vraiment avoir d'idées ? La préparation s'est bien terminée, mais c'est autre chose. En compétition officielle, c'est différent. J'ai eu l'expérience de remporter toutes les rencontres de préparation et de perdre en championnat 3 ou 4 rencontres d'affilée. Mais aussi l'inverse, une préparation catastrophique et un enchaînement de victoires en tout début de championnat. Finalement, il n'y a pas de vérité. Bien sûr, le premier match était pour moi très compliqué. Il fallait limiter la casse avec un effectif partiel. Les filles l'ont fait de manière professionnelle, mais c'était largement insuffisant. Mais quelle image pouvait-on donner du PSG ? «C'est ça, le PSG !? » Non ! Après, il y a eu des enchainements...

La rencontre du PFC à domicile, un derby, un premier gros match à la 2e journée, avec l'arrivée de Wang seulement 10 jours avant, avec une adaptation remarquable. On l'emporte 5-1, je pense que le PFC est passé au travers, parce que le PSG a montré de véritables qualités. Pas sur la constance. On va me dire que la gardienne fait deux erreurs, mais juste avant la première, Marie Katoto a deux énormes occasions, si elles vont au fond, on ne parle même pas de la gardienne adverse. Finalement, c'était une bonne rencontre, avec du jeu, de bonnes phases, des buts. Après ces deux premières rencontres, il y a eu le déplacement à Montpellier. Notre match référence pour moi d'un point de vue de la qualité de jeu, de la détermination, de l'abnégation. Beaucoup de belles choses.

Après, on retombe dans nos travers. Le groupe est jeune, manque de vécu. Il est capable de se mettre à très haut niveau, comme être capable de s'abaisser au niveau de l'équipe adverse, sans leur faire injure. Il faut trouver le bon curseur. Et ce qui pouvait arriver arrive, et on perd deux points contre Lille à domicile. Globalement il y a beaucoup d'écoute, j'ai beaucoup de messages, d'informations à leur faire passer chaque semaine. Mais l'intégration est longue, la communication peut être compliquée aussi. Finalement, il y a des rencontres où nous sommes menés au score, mais on a du caractère. Nous sommes toujours capables de revenir, de nous imposer, c'est une grande force. C'est vrai, nous avons du mal à l'emporter aussi facilement que l'OL. Nous rencontrons de la difficulté, je suis sûr que cela nous servira à l'avenir.

Après, ce genre de match comme face à Rodez, où on est mené, où on a du mal à revenir, je n'étais pas spécialement inquiet parce que je savais que le fait de produire du jeu allait nous faire gagner, que nous allions forcer le destin et marquer. Mais il est très facile de perdre la confiance chez les filles, dès qu'il y a un peu de difficultés.»

Pour revenir sur le déroulé de la saison, le PSG a déjà joué deux tours de Coupe d'Europe. Un premier considéré comme un tour de chauffe face aux Autrichiennes de Sankt-Pölten, un second contre une équipe d'un calibre un peu plus haut, les Suédoises de Linköpings. Comment avez-vous préparé ces deux tours, ne sachant pas vraiment où allait se situer le PSG dans cette compétition ?

« Pour moi, j'aimerais préciser qu'il n'y a pas de matchs faciles. On considère l'équipe d'en face, en fonction du tirage au sort, que cela peut être très facile, facile, difficile, compliqué, inabordable, en fonction du nom. Aujourd'hui, dans le football, ce n'est plus si facile. Regardez les performances du PSG contre Rodez, Metz, contre Soyaux à domicile, on a eu beaucoup de mal pour l'emporter. Pas de matchs faciles, encore plus en Coupe d'Europe. Vous parlez de tour de chauffe, oui. Mais faut-il encore aller gagner les matchs, mettre tous les ingrédients sur le terrain. On l'emporte 4-1 à Sankt-Pölten. Au retour, cet avantage me permet de faire une rotation, de préserver des filles, en reposer et faire vivre mon groupe. À ce moment-là, on a 24 joueuses, donc il faut faire vivre le groupe. Mais faire jouer celles qui le méritent. Parce que cela ne doit se jouer que sur le mérite, celle qui ne joue pas le jeu, qui n'a pas le bon état d'esprit, je ne la prends pas. Forcément, au retour, on a géré comme il le fallait, avec des filles en manque de temps de jeu. Cela s'est vu. Dans l'utilisation du ballon, le jeu, le rythme... Marie Katoto marque, Melike Pekel marque, c'était très bien pour elle de se montrer. Et de jouer des matchs de Ligue des Champions, pour certaines d'entre elles, il s'agissait de leur première rencontre en Coupe d'Europe ! Il fallait aussi leur faire sentir qu'il s'agissait d'un autre parfum que le championnat dans la préparation et l'approche.

Pour le second tour, Linköpings, on a fait ce qu'il fallait au match aller. On aurait dû aggraver le score en fin de match. Christiane Endler fait un arrêt déterminant à 0-0 qui nous permet de bien rester dans le match. On constate que l'équipe a bien pris ses repères dans la construction et on marque deux buts. À la fin du match, on aurait pu en marquer deux de plus. Au retour, je suis un peu partagé. On l'a emporté 2-0, mais ce n'est pas 3 ou 4-0. Donc, il faut laisser une équipe mixte sur le terrain, capable de tenir le match. On l'emporte 3-2 en menant au score. Je n'aime pas du tout prendre 2 buts comme cela, je leur ai fait savoir à chaque fois. Mais Linköpings fait partie des trois meilleures équipes du championnat de Suède, face à une équipe qui a des valeurs mentales importantes, dans le combat, même quand elles sont menées, elles ne lâchent pas. Cet état d'esprit est le bon, des fois, on est surpris, il faut faire attention en Coupe d'Europe.

On perd aussi beaucoup de forces avec la Coupe d'Europe. Physiquement, psychologiquement, nerveusement. Même chez les filles qui n'ont pas forcément joué, on constate qu'il y a une fatigue nerveuse. Lorsque les matchs de championnat arrivent juste après, automatiquement, on sent qu'il y a une décompression.» 

Dans la seconde partie de l'entretien, nous abordons la rencontre face à l'OL, la fin de la phase aller et les deux rencontres d'avant-trêve, puis les objectifs du club pour cette seconde partie de saison et le recrutement éventuel lors du mercato d'hiver.


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