Avant la seconde manche entre l'OM et le PSG, nous sommes allés interroger Matthias Ribeiro, analyste tactique pour Coparena et So Foot, à propos de son club de cœur. L'occasion de revenir sur le plan de jeu très risqué de Tudor, ses partis pris tranchés ou encore les forces et faiblesses de l'OM.
Lors du dernier match de Coupe de France, Tudor avait un plan de jeu ultra osé d'un point de vue défensif qui était rendu possible par l'absence de Mbappe. Avec l'attaquant français de retour, l'imagines-tu capable de proposer quelque chose de la sorte malgré tout ?
« Oui je pense qu'il restera fidèle à ses principes, comme il l'a toujours fait depuis son arrivée. Peut-être avec plus de parcimonie pour ne pas trop se découvrir car la menace en profondeur sera supérieure avec Mbappé mais il ne reniera pas son fort pressing haut et son marquage individuel. Néanmoins, on devrait peut-être moins voir les centraux dans le dernier tiers parisien (la faute à l'absence de certaines individualités marseillaises, aussi) pour anticiper d'éventuelles transitions. »
Avec les absences probables de Mbemba et Gigot, comment tu imagines la défense marseillaise s'organiser ?
« A titre personnel je vois Kolasinac - Bailly - Balerdi. Le premier est installé et très bon depuis quelques temps, le second a repris du temps de jeu et du rythme à Clermont et à Toulouse après sa suspension et le dernier joue très régulièrement, en plus d'avoir certaines aptitudes dans la couverture. Rongier avait joué défenseur central à l'aller mais c'était aussi lié à l'absence de profondeur adverse. Là, je pense que Tudor voudra garder son tandem Rongier - Veretout au milieu pour compenser et équilibrer les projections. »
Le PSG a des problèmes de disponibilités chez ses latéraux avec les absences assez probables de Nuno Mendes et Hakimi, quelles défenses ont posé le plus de problème à l'OM cette saison : à 4 ou à 5 ?
« Je ne suis pas sûr que ce soit une question de système mais plutôt d'animation. L'OM a été en difficulté face à Toulouse, Nice, face à Lorient par séquence, donc des défenses à quatre... A chaque fois contre des collectifs prêts à subir la pression et à s'en défaire collectivement (Toulouse avec les appuis remises des milieux vers Rouault ou le jeu long niçois vers Laborde) ou individuellement (face à Le Fée et Moffi notamment). »
L'absence de Mbemba est un énorme problème pour l'OM tant il est important défensivement. Mais vu son poids pour apporter du danger côté droit avec Clauss, comment l'OM va pouvoir compenser ?
« L'apport aurait sûrement déjà été plus faible qu'en Coupe de France avec la présence de Kylian Mbappé dans sa zone mais je pense simplement que l'OM ne compensera pas. Balerdi (s'il est aligné) est un joueur agile mais plus par la passe que par la conduite et le dribble. Un tel joueur dans une telle forme, offensivement ou défensivement, est irremplaçable. Ce sera à Clauss et Under (s'il est aligné, ce qui devrait être le cas) de montrer un peu plus de complicité qu'à l'accoutumée pour déséquilibrer le côté droit. »
L'OM semble jouer une mi-temps sur deux lors de ces derniers matchs, est-ce une conséquence d'une certaine érosion physique ou des difficultés à s'adapter à des plans de jeux adverses de plus en plus précis ?
« L'OM a indéniablement des difficultés à commencer les matchs »
« Je penche malgré tout pour la difficulté à répéter les efforts. Je ne vois pas une équipe épuisée physiquement (peut-être mentalement ?) mais elle a indéniablement des difficultés à commencer les matchs, notamment physiquement, ce qui peut être paradoxal. Cela handicape forcément l'OM qui base une bonne partie de son football sur son énergie. Théorie d'autant plus validée quand on sait que la tendance a souvent été renversée en deuxième après avoir remis un coup de collier.
Mais c'est évident que l'adaptation des adversaires jouent un rôle, Rongier et Tudor l'avaient d'ailleurs signalé après Nice en conférence de presse. Surtout que le marquage individuel est très efficace, mais aussi facilement démontable avec de la justesse sous pression et certains circuits mécaniques travaillés auparavant (Toulouse). »
Là où Galtier change régulièrement de système pour tenter de s'adapter aux joueurs à disposition, Igor Tudor a fixé un 3 4 2 1 immuable côté olympien, quitte à mettre certains joueurs dans une position pas toujours naturelle (Guendouzi notamment). En quoi cette stabilité tactique a aidé l'OM cette saison ? Est-ce là la principale limite de son équipe?
« Chaque joueur sait quoi faire, comment et quand »
« Cette stabilité a aidé notamment dans la progression des joueurs. Certains comme Veretout, Balerdi, Gigot, Under ont pu monter en puissance au fil de la saison en s'adaptant aux besoins de l'équipe grâce à de nombreux repères/habitudes accumulés en enchaînant au même poste. Cette stabilité est aussi précieuse quand on sait que l'OM est une équipe parfois chaotique dans le jeu qui se désarticule souvent, avec le marquage individuel ou les projections de certains joueurs. Avoir cette structure stable et forte aide particulièrement à couvrir et compenser tout ça. Chaque joueur sait quoi faire, comment et quand.
Je ne pense pas que ce soit une limite puisque l'OM a des profils différents. Des pistons avec des pieds différents, Sanchez et Vitinha n'ont pas le même profil devant, Under peut jouer à droite avec un profil très vertical, Malinovskyi aussi mais dans un profil de troisième milieu... L'effectif pléthorique offre différentes solutions, toujours dans le même cadre, un cadre qui est aussi responsable de la saison historique de l'OM. »
Un grand merci à Matthias (@MatthiasR_) pour le temps accordé.
