Alternant entre le français, l'espagnol et l'anglais, Luis Enrique était en conférence de presse dans la nuit de mercredi à jeudi avant le match PSG/Botafogo de ce jeudi 18h à Pasadena (3h du matin vendredi, heure française). L'entraîneur espagnol a répondu à des journalistes du monde entier sur des thématiques bien différentes. Il a notamment donné des nouvelles d'Ousmane Dembélé et encensé la mentalité de son groupe. Voici ses propos en intégralité, traduits par nos soins.
Il y a une euphorie qui a gagné le PSG depuis la victoire en Champions League et qui s’est prolongée avec cette victoire 4-0 contre l’Atlético Madrid. Considérez-vous que votre travail d’entraîneur est de prolonger cette euphorie ou au contraire de faire garder les pieds sur terre aux joueurs ?
(Il répond en français)
« Je pense que c’est normal (qu’il y ait de l’euphorie) après avoir gagné la Ligue des champions. On peut voir que tout le monde est en train de très bien parler sur nous. C’est joli de recevoir ça, mais en même temps, on cherche à s’améliorer. C’est notre objectif en tant qu’équipe et on a confiance. »
Pendant cette compétition, vous avez accordé des plages de repos aux joueurs pour s’aérer mentalement. Est-ce que vous aussi vous vous accordez ces plages de repos et comment vous occupez-vous pendant votre temps libre ?
« Je suis différent d’un jeune joueur. Je ne dois rien faire de spécial. Je n’ai pas de temps avec ma famille, mais je cherche à faire passer le temps en me promenant, en allant un peu à la plage. Rien de spécial. »
Le match de demain est un grand évènement pour les Brésiliens de Botafogo, c’est un match très spécial. Que savez-vous de cette équipe, comment l’avez-vous préparé ?
(Il répond cette fois en espagnol)
« Affronter Botafogo sera assurément un grand défi »
« Pour nous, c’est également super de jouer contre une équipe brésilienne de haut niveau, avec une histoire puissante et qui a gagné la Copa Libertadores en 2024. Ils vont sûrement nous poser des problèmes et nous mettre dans des circonstances de jeu difficiles et peut-être différentes de celles qu’on rencontre contre des équipes européennes. Mais ce sera assurément un grand défi et une motivation pour nous également. À partir de là, on prépare nos matches quasiment toujours de la même manière parce que notre expérience nous fait dire que la majorité des équipes que nous affrontons ont l’habitude de changer leur façon de jouer quand ils nous affrontent. Nous avons vu jouer Botafogo, nous les avons vu gagner leur premier match de cette compétition, nous avons vu leur niveau, qui est élevé. Ce type de match n’en reste pas moins toujours un peu une surprise, mais nous le préparons toujours de la même manière. C’est pour ça que les joueurs vous ont dit que rien n’avait changé dans la préparation. Nous essayons d’être préparés à tous les problèmes et toutes les circonstances qui pourraient apparaître durant le match. »
Êtes-vous surpris que les équipes brésiliennes et sud-américaines en général rendent la tâche si difficile aux équipes européennes, qu’on pensait largement favorites ? Et qu’avez-vous à dire à ceux qui programment les matches à midi, avec 40 degrés ?
« Concernant la première question, je ne suis pas surpris. Concernant la seconde, je ne sais pas qui définit les horaires des matches. »
Le journaliste le relance sur la seconde question.
« J’ai déjà dit ce que j’avais à dire, mais c’est évident que c’est difficile de tout combiner pour qu’on puisse voir nos matches en Europe à des horaires convenables pour la télévision, pour qu’on puisse mettre de la publicité et que la compétition devienne une référence. Mais c’est vrai qu’il faudrait essayer de réussir à faire en sorte que les joueurs puissent évoluer dans les meilleures conditions, car au final, ce sont les joueurs et les équipes qui font le spectacle sur le terrain. Meilleur est le spectacle, mieux c’est pour tout le monde. Mais parfois c’est difficile de gérer tout cela. Nous allons jouer demain à 18h (3h du matin en France), ce qui est je pense un grand avantage par rapport au fait de jouer à 12h et j’espère que les deux équipes pourront offrir à tous les supporters un beau spectacle. C’est l’objectif. »
On a pu assister à une partie de l’entraînement ce matin et on vous a vu très investi durant un atelier de vos joueurs devant le but. Comment travaillez-vous dans ces moments-là, avez-vous l’occasion ensuite de débriefer avec les joueurs ? Et pour le match de demain, est-ce qu’on peut s’attendre à des changements ?
« Normalement, quand tu joues contre un adversaire que tu connais, c’est plus facile de voir ce que tu dois gérer. Dans le cas de Botafogo, nous devrons être prêts, quel que soit le scénario. La manière de nous entraîner, c’est comme d’habitude, car nous cherchons à faire le même match, quel que soit l’adversaire. Je pense que c’est une de nos forces et que nous devons continuer comme ça. C’est important de savoir qu’en ce moment, tout le monde veut jouer contre nous et nous battre. C’est une situation différente à gérer et nous devons êtres prêts pour demain et les autres matches qui arrivent. »
Vitinha a été MVP l’autre jour contre l’Atlético Madrid. Beaucoup de supporters ici ont commencé à chanter « Ballon d’Or ». On a aussi vu ce genre de message sur les réseaux sociaux. Si la cérémonie du Ballon d’Or avait lieu demain, à quelle position mettriez-vous Vitinha ?
« Si demain c’était le Ballon d’Or, je le mettrais sur le banc. Qu’en pensez-vous ? »
La journaliste espagnole précise à Luis Enrique qu’elle ne parlait pas de poste sur le terrain, mais de place au classement.
« Ce que transmet notre équipe est beaucoup plus important qu’un Ballon d’Or »
« Ah, mais moi le Ballon d’Or ne m’intéresse pas. Je m’en fiche complètement des trophées individuels. Je suis désolé. J’ai déjà donné mon favori il y a quelque temps, qui est Ousmane Dembélé, sans aucun doute. Je comprends qu’il y ait tout ce bruit autour du Ballon d’Or, c’est normal, ça fait vendre. Chacun a son joueur favori et il y a beaucoup de joueurs qui pourraient l’avoir en plus d’Ousmane, mais mon favori à moi c’est lui. Vitinha pourrait aussi le gagner, tout comme Hakimi, Fabian Ruiz et d’autres joueurs de l’effectif… Marquinhos, Pacho, Nuno (Mendes). Tous mes joueurs, mais au final, je ne sais pas qui vote et cela ne m’intéresse pas beaucoup de toute façon. Je crois beaucoup plus en ce qu’est notre équipe, ce qu’elle représente pour le football. Je crois beaucoup plus en la force de notre équipe et de notre club. C’est ce qui est beau de mon point de vue et je pense que c’est aussi quelque chose à transmettre aux enfants. Ils ont souvent un objectif individuel, mais le football est un sport collectif. Un sport d’équipe est gouverné par des paramètres de groupe, par le fait de savoir souffrir ensemble, profiter ensemble et je crois que ce que transmet notre équipe est beaucoup plus important qu’un Ballon d’Or, qui est un prix individuel qui m’intéresse très peu. »
Comment fait-on pour motiver ses joueurs quand on vient de gagner l’une des plus belles compétitions au monde ?
« C’est facile quand tu as ce type de joueurs, qui aiment jouer au football, s’entraîner tous les jours, gagner chaque match d’entraînement. C’est très facile. C’est important pour nous en tant qu’entraîneurs d’avoir des joueurs avec cette mentalité. Ils s’entraînent tous les jours avec le sourire. Je pense que c’est la clé. »
Dans les années 50 et 60, Botafogo était le grand rival du Santos mythique de Pelé. À l’époque, ces équipes affrontaient régulièrement les Européens. Puis cela est devenu rare ensuite. Cette Coupe du monde des clubs est donc une grande opportunité pour Botafogo et les équipes sud-américaines. À votre avis, comment les Brésiliens abordent cette confrontation face à vous ?
« Je ne le sais pas honnêtement car je ne connais pas vraiment l’école brésilienne. Je n’ai aucun doute sur le fait qu’ils soient une référence mondiale. Les joueurs brésiliens sont des joueurs qui se distinguent partout dans le monde. Beaucoup viennent en Europe et on a la chance de pouvoir en profiter. Vous m’avez parlé de Pelé contre Garrincha, c’est ça ? C’était ce genre de duel, pas vrai ? Quelle merveille cela devait être de voir ces matches en direct. Mais je crois que si quelque chose caractérise le football brésilien, c’est la qualité de ses joueurs. J’ai pu jouer avec plusieurs joueurs brésiliens durant ma carrière de joueur, et c’était un plaisir de profiter d’eux en Europe. Aujourd’hui, il y aussi beaucoup de joueurs européens qui vont au Brésil ou en Amérique et je crois que ça aussi c’est positif. Demain, on aura donc une opposition ente deux styles un peu différents et je crois que ça va être un match beau et intéressant à regarder. »
Je ne sais pas si vous le savez, mais dans cette partie du monde, on pense que votre PSG est peut-être l’équipe qui joue le mieux au football actuellement dans le monde et que votre équipe peut marquer une époque comme le Barça de Guardiola en son temps. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez. Une autre question. Vous n’allez pas vraiment affronter le Botafogo qui a gagné la Libertadores puisqu’ils ont perdu depuis une dizaine de joueurs. Est-ce un avantage que vous avez en Europe de pouvoir garder vos meilleurs joueurs quand vous êtes sacrés champions ?
« Je vais profiter de votre question pour éclaircir des propos qu’on me prête souvent. Certains pensent que j’ai dit que les joueurs européens étaient meilleurs que les joueurs sud-américains. Non, je n’ai jamais dit cela. Ce que j’ai dit, c’est que nous avions un avantage par rapport à ces équipes sud-américaines comme Botafogo qui perdent leurs meilleurs joueurs. Nous en Europe, nous captons tous les meilleurs joueurs d’Amérique du sud, d’Amérique centrale et d’Amérique du nord. C’est pour ça que j’ai dit que les équipes européennes étaient meilleures. Donc ça c’est ma réflexion sur ce sujet. Nous savons où est l’argent, nous savons quels sont les clubs et les pays où il y a cette possibilité et nous en profitons clairement pour récupérer les meilleurs joueurs du monde entier.
« Nous ne sommes qu’au début, aux prémices d’une équipe qui veut devenir meilleure et dominante »
Est-ce que nous sommes la meilleure équipe du monde ? Non. Nous sommes champions d’Europe et ça personne ne peut nous l’enlever. Je pense également que nous sommes un champion d’Europe légitime, parce que notre parcours a été difficile. Mais nous ne sommes qu’au début, aux prémices d’une équipe qui veut devenir meilleure et dominante. Est-ce qu’on va y parvenir ? Je ne sais pas. Mais notre objectif est très, très ambitieux. Nous avons les joueurs et un club qui veut gagner, qui veut continuer à gagner. Nous avons des supporters qui méritent de gagner beaucoup et c’est notre objectif. Un objectif ambitieux mais difficile à réaliser parce qu’on sent bien que nos adversaires ont quelque chose de spécial quand ils jouent contre nous. C’est donc un très beau défi pour nous. »
Vous passez beaucoup de temps avec votre équipe et vos joueurs en ce moment. Comment gérez-vous cela en tant que groupe ? Et comment l’environnement et l’atmosphère du groupe ont changé depuis la victoire en Champions League ?
« Je dois dire que l’atmosphère est la même qu’avant la Champions League. Je peux dire que la semaine avant la finale était difficile car il y avait beaucoup trop d’excitation autour de l’équipe. Mais maintenant, c’est la même ambiance qu’en début de saison. Tout le monde rigole et profite de la saison. Tout le monde est impatient de jouer le prochain match contre Botafogo et je suis très heureux avec l’atmosphère que je ressens ici dans l’équipe. »
Si vous deviez choisir un style de football, en dehors du style européen, lequel choisiriez-vous ?
« Pour vous faire une réponse honnête, je devrais analyser plus en profondeur la compétition. Nous ne sommes qu’à la première semaine et je n’ai pas pu voir tous les matches. Mais c’est agréable de voir une équipe africaine affronter une équipe asiatique. Vous pouvez apprécier la façon dont chacun essaye de jouer. C’est sympa de voir différents styles et j’aime voir ces matches, mais pour analyser cela en profondeur, nous avons besoin de plus de temps et de plus de matches. Peut-être même de voir tous les matches. En fin de compétition, ce sera plus facile à analyser peut-être. »
Est-ce qu’on peut avoir des nouvelles de Dembélé, qu’on a encore vu à l’écart aujourd’hui. Est-ce que vous comptez sur lui éventuellement pour le 3e match ou plutôt pour un éventuel 8e ?
« Je ne sais pas. Il est en train d’améliorer (sa condition) très vite, mais en même temps on doit être calme et penser à ce qui est le meilleur pour le joueur. Nous sommes une vraie équipe et nous voulons Ousmane Dembélé le plus vite possible avec l’équipe, mais pour le moment on doit attendre et être prudent. »
Comment faire en sorte que votre équipe reste dans les rails quand tout le monde veut vous battre désormais ?
« Eh bien il faut transformer ça en une motivation pour les joueurs et l’équipe. Comme je l’ai dit à votre confrère, j’ai la chance d’avoir des joueurs qui prennent du plaisir à s’entraîner, à se lever le matin pour aller s’entraîner. On doit même insister pour qu’ils quittent le terrain quand l’entraînement est fini parce que eux ont envie de continuer à jouer et s’entraîner. Quand tu as ça dans une équipe et cette ambition… (il ne finit pas sa phrase). On doit même les calmer pour qu’ils rentrent au vestiaire et se préparent avec le repos nécessaire. »
Vous allez affronter demain Renato Paiva, qui a entraîné à Benfica puis à Independiente del Valle, où il a fait découvrir Pacho notamment. Est-ce que ça vous plairait d’entraîner un jour en Amérique du sud, un continent passionné par le football ? Est-ce que vous aimeriez entraîner Boca Juniors, River Plate, au Brésil peut-être ?
« (Rires) Je ne sais pas. Ce sont des clubs historiques avec une grande passion autour. Peut-être, je ne sais pas. Je ne ferme aucune porte, je suis ouvert à tout. Peut-être. »