Michel Montana, speaker historique du Parc des Princes, s'est confié durant plus d'une heure à CulturePSG. En raison de la longueur de l'entretien, nous vous proposons de le découvrir en trois parties différentes sur notre site. Durant ce troisième et dernier épisode, Michel Montana revient sur les récentes éliminations douloureuses du PSG en Ligue des Champions, rend hommage à Unai Emery et se confie sur son rêve de reconversion.
À travers la première partie de l'entretien, Michel Montana retrace son parcours et raconte le métier de speaker. Dans le second acte de cette longue interview, le speaker du Parc des Princes revient sur ses meilleurs souvenirs au PSG, évoque Neymar, Rai, et se réjouit du retour des Ultras au Parc.
Est-ce que vous prenez autant de plaisir à commenter un match de Ligue 1 sans enjeu particulier et un match à élimination directe de Ligue des Champions ?
«Derrière le speaker, il y a un supporter»
C'est un plaisir différent. C'est le même plaisir parce que je suis toujours aussi friand de belles actions de mes joueurs préférés. Par contre, un match à enjeu, c'est vrai que cela amène une dimension supérieure, cette espèce de boule au ventre, à la fois pour le supporter et pour le speaker. Je suis comme tout supporter. Derrière le speaker, il y a un supporter. Même si j'essaie de ne pas trop le montrer, parce que je me dois de respecter l'équipe et les supporters adverses. Mais, un match à enjeu, c'est quand même fabuleux.
Est-ce que votre préparation diffère avant un match à enjeu important ?
C'est un peu la même préparation. Par contre, ce n'est pas tout à fait le même protocole. Un match de Ligue des Champions, c'est beaucoup plus solennel. En termes d'animation, j'ai beaucoup moins à faire. L'UEFA est très pointilleuse sur tout ce qu'il se passe autour de la rencontre. Il y a un protocole très, très strict. Et il y a beaucoup de choses qu'on ne fait pas. Il y a des animations qui sont propres aux matchs de Ligue 1 et non pas en Ligue des Champions. Par contre, je suis encore plus concentré. Pas le droit à l'erreur. Il y a des représentants de l'UEFA partout. Tout est contrôlé. Je suis réduit à un périmètre précis durant le match. Je bouge davantage lors des matchs de Ligue 1. C'est donc différent, mais c'est aussi beaucoup de plaisir. C'est peut-être plus tendu.
Comment avez-vous vécu l'élimination du PSG face au Real Madrid cette saison, en huitième de finale retour de la Ligue des Champions ?
«Je suis encore un peu sous le choc»
Je vais être franc avec vous. Je ne dis jamais de mal de mon équipe, parce que c'est mon équipe. Sans langue de bois, je trouve tout le temps des circonstances atténuantes. Mais là, je n'ai pas compris. Je n'ai pas reconnu certains joueurs, que j'aime pourtant beaucoup. Tout supporter veut qu'un joueur se batte, montre son envie. Et là, il n'y a pas eu cette envie quoi... Donc je n'ai pas envie d'en dire plus, je suis encore un peu sous le choc.
Comment était l'ambiance au bord du terrain ?
«On était tous sonnés»
On était tous abasourdis. Il y en a certains qui sont vite rentrés au vestiaire, qui n'avaient pas envie de parler aux journalistes. On était tous sonnés. Mais dans ces cas-là, il faut rester pro et faire son travail. En ce qui me concerne, je me tourne déjà vers le prochain match, voire vers la saison suivante concernant la Ligue des Champions.
Quel regard portez-vous sur les échecs à répétition du PSG en Ligue des Champions ?
Ce que je vois, c'est le parcours des dernières saisons. J'ai quand même connu les années de vaches maigres, notamment le moment où on a failli descendre en Ligue 2 [en 2008, ndlr]. Désormais, chaque saison apporte son lot de rêves, de plaisir, d'actions, de buts venus d'ailleurs, de joueurs dont on n'aurait jamais pu imaginer qu'ils puissent un jour revêtir le maillot du PSG. Donc il y a eu deux grandes claques, c'est vrai, mais cela fait partie du football. Et on appréciera encore plus quand le vent tournera dans le bon sens.
Qu'est-ce qu'il manque au PSG, selon-vous ?
«Je pense qu'il y a du lobbying au niveau des instances»
Pour arriver au plus haut niveau en Ligue des Champions, il faut avoir une expérience telle… cela dépasse le sportif. Je pense qu'il y a du lobbying au niveau des instances. Même constat pour les arbitres. Ce n'est même pas que l'arbitre est acheté, je ne dis pas ça. C'est tout simplement qu'il est plus respectueux avec certaines équipes. Je suis sûr qu'il y a des arbitres qui n'ont peut-être pas l'expérience suffisante, et qui se retrouvent en face de joueurs qu'ils ont admiré eux-mêmes quand ils étaient plus jeunes. Il y a donc une espèce de respect qui fait qu'au moment de siffler, ils vont peut-être hésiter. Et donc cette expérience, on va l'acquérir petit à petit, j'en suis sûr. Le plus beau est à venir.
Après deux ans à la tête du PSG, Unai Emery ne coachera plus le club de la capitale la saison prochaine. Quel souvenir gardez-vous du technicien basque ?
«Emery ? Un bosseur»
J'ai envie de le résumer en un mot : bosseur. On pouvait le trouver tendu, stressé, mais parce qu'il bossait comme un malade, et jusqu'au bout. À ce niveau-là, il mérite aussi notre respect.
Êtes-vous déçu de le voir partir ?
Je deviens fataliste. J'ai tellement vu d'entraîneurs arriver et repartir… Cela fait partie du foot. Je trouve qu'Unai avait quand même amené quelque chose dans le jeu. Après, il a peut-être tiré le maximum de ce qu'il pouvait tirer de l'équipe. C'est peut-être le seul reproche que j'ai à lui faire. Il n'a pas brisé ce plafond de verre qu'on attend tous et qu'on atteindra dans quelques années.
Quelle empreinte va-t-il laisser au PSG ?
Il va laisser un paquet de titres au PSG. Il a quand même remporté quatre trophées dans la saison. Quatre trophées ! Il faut qu'on s'en rende compte. Ça, on ne pourra pas lui enlever. Donc je dis bravo à Emery. Gloire lui soit rendue !
Comment est-il humainement ?
Très gentil. Mais dans son monde. Dans sa bulle. Je trouve qu'il s'est plus lâché en fin de saison. On l'a senti un petit peu plus soulagé. Parfois, il me saluait assez brièvement. Ces dernières semaines, je sentais la poignée de main chaleureuse et le regard franc. Je pense qu'il avait la satisfaction du minimum accompli.
Quel regard portez-vous sur Thomas Tuchel, nouvel entraîneur parisien. Avez-vous eu déjà l'occasion de le rencontrer ?
Je ne le connaissais pas. Je me souviens juste que Dortmund jouait bien, et a tenu tête au Bayern Munich. Et cela, c'est énorme ! C'est comme Unai Emery, il ne faut pas critiquer avant. Il faut voir. Peut-être que je le croiserai au Camp des Loges, avant le début de la saison. En tout cas, je n'ai pas d'a priori sur lui. Comme à chaque fois, je suis plein d'espoir. Tuchel prône un football spectaculaire, d'attaque. Moi, ça me convient. Et cela convient au Parc.
Quel joueur aimeriez-vous voir signer au PSG particulièrement ?
«N'Golo Kanté, ce serait super»
N'Golo Kanté, ce serait super, en tant que numéro 6. En tout cas, j'ai envie qu'on garde les trois quarts de l'équipe. Ne bouleversons pas tout. Je suis hyper motivé pour la saison à venir.
En pleine période de mercato, la question me semble évidente. Michel Montana au PSG, jusqu'à quand ?
Tant que le club voudra bien de moi. Je n'ai pas envie de faire l'année de trop. Pour le moment, je prends toujours du plaisir. Ce que je n'aimerai pas, c'est que les gens disent à un moment donné «Ah, il fait ringard», en parlant de moi.
Aimeriez-vous avoir un rôle plus tard au sein du club ?
«J'adorerais représenter le PSG à travers le monde»
Non, pas vraiment. Ah si, il y a quelque chose qui me ferait rêver, alors si jamais la direction m'entend : j'adorerais représenter le PSG à travers le monde, en visitant les PSG Academy et les écoles rouges et bleues, pour apprendre aux jeunes gamins des quatre coins du monde à dire «Ici c'est Paris», ou faire répéter trois fois les noms de Cavani et Neymar, comme je le fais tous les quinze jours au Parc.