En prenant comme point de départ la défaite de dimanche dernier face à Nantes (1-2), l’une des plus mauvaises performances en attaque de l’exercice 2020/2021, nous nous sommes penchés sur les indicateurs offensifs du PSG cette saison. D’une part en les comparant aux saisons antérieures, d’autre part en évaluant l’impact du changement de coach en début d’année. Attention, ça pique !
En frappant onze fois au but face à Nantes dimanche dernier, les Parisiens ont généré 0.88 Expected Goals (c’est-à-dire les buts attendus compte tenu des positions de frappe obtenues). Ces deux chiffres, très faibles, qui plus est face à une équipe avant-dernière, traduisent bien les difficultés offensives parisiennes du moment.
Les Expected Goals face aux Canaris sont même les plus faibles depuis que Pochettino a pris l’équipe en main. L’analyse par joueur de ces 0.88 xG rend le constat encore plus désolant puisqu’à eux cinq, les attaquants alignés successivement sur la pelouse (Mbappé, Di Maria, Draxler, Icardi et Sarabia) n’ont provoqué que 0.27 xG !
C’est Marquinhos, avec sa tête sur corner en début de partie, qui a eu la meilleure opportunité de marquer. Rafinha, en trois frappes (deux de l’extérieur de la surface et une tête) plafonne à 0.16. Mbappé a livré l'une de ses moins bonnes sorties de la saison en termes d’xG (0,12), après son zéro pointé face à Monaco, ses 0.05 à Saint-Etienne et ses 0.11 contre Lorient. On notera au passage que les contre-performances offensives de Mbappé et du PSG sous Pochettino se superposent étrangement. Trois buts face à Lille en Coupe de France ? Deux de Mbappé...
C’est déjà la cinquième fois de la saison, soit autant que lors des deux derniers exercices cumulés, que le PSG ne produit même pas 1 « but attendu » sur une rencontre : 0.34 à Lens, 0.31 face à Lyon, 0.55 à Lille, 0.95 contre Monaco et donc 0.88 contre Nantes. Autant les contre-performances offensives précédentes peuvent à la rigueur être justifiées (équipe décimée pour commencer la saison à Bollaert et 3 matches contre les 3 meilleures équipes de Ligue 1), autant la faillite en attaque face aux hommes de Kombouaré est inexcusable. Prétexter l’absence de Neymar et le contre-coup de la qualification en quart de finale de Champions League n’est pas entendable.
Un accident, vraiment ?
La thèse de l’accident, évoquée après le match, ne résiste pas à l’analyse des indicateurs offensifs de la saison 2020/2021, en particulier depuis le changement d’entraîneur. A commencer par les Expected Goals puisque l’on a débuté cet article en utilisant cet indicateur : le PSG crée en moyenne 2.23 xG par match en Ligue 1 cette saison contre 2.83 la saison dernière. L’écart est colossal puisqu’il représente un différentiel de 23 buts sur une saison entière.
Certes, la performance de la saison dernière était pour le moins exceptionnelle (personne ne faisait mieux dans son propre championnat parmi les cinq principales ligues européennes). Mais la moyenne de cette année est la plus faible des quatre dernières saisons.
Il faut en effet remonter à la première saison d’Unai Emery (2016-2017) à la tête du club pour trouver une production offensive comparable. Cependant le coach basque n’avait ni Mbappé, ni Neymar à sa disposition (ni Ibrahimovic d’ailleurs) mais plutôt des Cavani, Lucas ou Ben Arfa, voire Jesé et Augustin. Pour l’anecdote, cette saison-là, le quintet produisant sur la saison le plus d’xG était le suivant : Cavani-Lucas-Di Maria-Matuidi-Aurier…
Une comparaison Tuchel-Pochettino largement favorable à l’Allemand
Si l’on revient au présent et à la déroutante saison actuelle, on n’a pas pu s’empêcher de comparer les performances offensives du PSG avant et après le changement de coach.
Et la comparaison en termes d’xG n’est guère flatteuse pour le staff actuel : 2.39/match pour Tuchel contre 2 pour Pochettino.
Le graphique ci-dessus situe même la production offensive sous Pochettino comme la pire de l’histoire récente du club. Certes, l’échantillon de matches est trop faible pour tirer un bilan définitif (12 matches analysés). Mais, a contrario, le PSG depuis janvier n’a guère rencontré de cadors en championnat.
Mis à part Monaco, le PSG de Pochettino (en rouge sur le graphique ci-dessus) n’a pour le moment affronté que des équipes modestes de Ligue 1. En outre, sa moyenne d’xG, pourtant déjà bien basse, est tirée vers le haut par le feu d’artifice offensif contre Montpellier, permis notamment par l’expulsion du gardien adverse après 19 minutes (4.91 xG, record de la saison). Malgré cela, le PSG de Pochettino ne fait donc pas mieux que 2 « buts attendus » par rencontre en moyenne.
Le pire PSG de l’histoire récente en attaque ?
Ce constat à partir des expected goals, un modèle qui connaît forcément des limites, est-il confirmé par les indicateurs offensifs traditionnels ?
Oui. Si l’on regarde assez simplement les buts inscrits par match ou les tirs, l’analyse reste identique.
Avec 2 buts inscrits par match (soit le même niveau que les xG), le PSG de Pochettino présente la plus mauvaise attaque depuis près de 10 ans. Il faut en effet remonter à la saison 2012-2013 (Ancelotti aux manettes) pour retrouver un exercice avec moins de 2 buts marqués par match. Depuis, la tendance était plutôt de s’approcher des 3 buts/match que de redescendre vers les 2 !
La décrue était certes entamée sous le mandat de Tuchel en début de saison. Mais Pochettino n’a pas su jusqu’à présent enrayer cette chute et l’a même au contraire accélérée. La moyenne sur la saison est de 2.17 buts/match.
Le constat est globalement le même avec les tirs : la moyenne de la saison (14.4) est en net recul par rapport à l’exercice précédent (16.6). Et la comparaison Tuchel-Pochettino est encore défavorable au coach argentin.
En outre, là aussi, la moyenne de tirs sur les douze matches coachés par Pochettino est l’une des plus faibles depuis que QSI a repris les rênes du club.
Comme on le voit, la thèse de l’accident ne tient pas vraiment pas la route. Les indicateurs offensifs du PSG cette saison, en particulier sur l’année 2021, sont nettement en retrait par rapport aux saisons précédentes.
Une baisse généralisée de la production offensive chez les cadors européens
Alors, comment expliquer cette tendance ?
La première explication évidente tient aux particularismes de cette saison complètement atypique compte tenu du contexte sanitaire. D’ailleurs, parmi les huit équipes présentes au Final 8 de Lisbonne en 2020, seules deux (Lyon qui ne dispute pas de coupe d’Europe cette année, et Barcelone) présentent une moyenne d’xG/match en hausse dans leur championnat par rapport à la saison dernière.
Le Bayern et City, qui dominent malgré tout leur championnat respectif, enregistrent des baisses de production offensive du même ordre que celle du PSG.
Des explications du côté des performances individuelles peuvent également être recherchées.
Le graphique ci-dessus montre d’une part que la quasi-totalité des attaquants apportent moins offensivement parlant que la saison dernière ; et d’autre part que Cavani, malgré une production globale sur la saison faible puisqu’il n’avait disputé que 14 matches (et 593 minutes), avait quand même une capacité incroyable à se créer des occasions (1.42 xG/90 minutes). L’arrivée de Kean a certes permis de compenser en partie son départ, mais en 19 matches (et 1320 minutes) il n’atteint pas encore tout à fait les xG cumulés de l’Uruguayen l’an passé (8.93 contre 9.33). La comparaison s’arrête là puisque l’Italien, au contraire de Cavani, « surperforme » par rapport au modèle avec 11 buts inscrits en seulement 8.93 xG.
Evidemment, les absences répétées de Neymar (11 matches joués sur 29, dont 9 titularisations) ainsi que l’arrivée en cours de saison d’un nouveau staff technique, sont également à inscrire dans la colonne des circonstances atténuantes du tableau assez noir dressé sur la partition offensive de ces derniers mois.
Paris reste malgré tout la meilleure attaque de Ligue 1
Enfin, pour conclure sur une note positive malgré tout, on peut également relativiser ce constat en mettant en avant qu’en dépit de cette forte diminution de la production offensive, le PSG reste la meilleure attaque de Ligue 1, que ce soit en nombre de buts (63 contre 57 à Lyon, 56 à Monaco et 49 à Lille), ou en expected goals.
Le graphique ci-dessous retrace l’évolution cumulée des xG sur la saison de Ligue 1 des quatre premières équipes du championnat, à la lutte pour le titre :
Après 29 journées, le PSG et Lyon, au coude à coude toute la saison, sont presque à égalité : 64.6 xG contre 64.4. En revanche, Monaco (52.3, soit 1.8/match) et surtout Lille (38.7 xG, soit 1.3/match) sont assez loin derrière.
Ça tombe bien : Paris se déplace au Groupama Stadium dimanche pour le compte de la 30e journée. L’occasion d’un festival offensif pour les hommes de Pochettino, contredisant le bilan assez négatif dressé dans cet article ? On ne demande que ça !