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[ITW CulturePSG] Dave Appadoo : « C'est la victoire de la simplicité »

Publié le samedi 20 avril 2024 à 19:25 par Numéro 10
Alors qu'il a suivi Barça/PSG (1-4) comme consultant sur la chaîne L’Équipe, Dave Appadoo est revenu pour CulturePSG sur cette soirée magique. En plus de tirer certains enseignements majeurs de ce match pas comme les autres, le journaliste de France Football s'est exprimé sur le traitement médiatique réservé à Kylian Mbappé et au PSG. Un grand format pour un grand exploit.
Alors qu'il a suivi Barça/PSG (1-4) comme consultant sur la chaîne L’Équipe, Dave Appadoo est revenu pour CulturePSG sur cette soirée magique. En plus de tirer certains enseignements majeurs de ce match pas comme les autres, le journaliste de France Football s'est exprimé sur le traitement médiatique réservé à Kylian Mbappé et au PSG. Un grand format pour un grand exploit.

Vous avez suivi avec attention ce Barça-PSG sur le plateau de la chaîne L’Équipe. Quelle est votre lecture du match ?

« Je trouve que le PSG attaque bien le match. Les premières minutes sont parisiennes, comme à l'aller d'ailleurs. Si on regarde bien, le pressing était très bon pendant 15 minutes au Parc. Jusqu'au moment où les Barcelonais décident d'allonger le jeu sur Lewandowski, qui fait une chanson pas possible à Beraldo et libère des espaces sur les côtés pour Yamal et surtout Raphinha qui prennent de vitesse la défense parisienne. Donc ça, c'est un peu le point d'achoppement sur le match aller. Là pareil, au retour, le PSG démarre bien avec un pressing qui fonctionne. Le truc, c'est que sur la première occase du Barça, ils encaissent un but qui est archi-évitable. Il n'y a rien qui va sur cette action. Nuno Mendes ouvre beaucoup trop la porte à Yamal. Lucas Hernandez ne ferme pas du tout le premier poteau, donc il laisse la place pour le centre devant le but et Donnarumma se retrouve planté à son poteau. Enfin, Hakimi est en retard sur le buteur, Raphinha. Et à partir de là, pendant quelques minutes, ça flotte côté parisien et Lewandowski a une énorme balle de 2-0 qui aurait pu changer beaucoup de choses, y compris sur ce qui va suivre et être le fait de match majeur. C'est la faute d'Araujo qui fait cette erreur incroyable.

« Araujo fait une erreur incroyable, il doit laisser Barcola affronter Ter Stegen »

C'est-à-dire qu'il compromet fortement la suite du match de son équipe, en laissant ses coéquipiers à dix, pour empêcher Barcola de se présenter en un-contre-un face Ter Stegen. Sachant que c'est Barcola, avec tout le potentiel qu'on lui connaît, mais aussi les axes de progression, parmi lesquels la finition. Devant le but, ce n'est pas encore Cristiano Ronaldo. Je lui souhaite un jour, mais a priori ce n'est pas le cas. Donc pour moi, Araujo doit tous les jours le laisser aller affronter Ter Stegen qui n'est pas le premier venu. Et au pire, s'il marque, le Barça se retrouve à 1-1 et toujours en position favorable pour se qualifier. Là, il sacrifie complètement tout, parce que les fils se touchent et c'est là que le match bascule. Mais, attention, moi je n'en fais pas un fait de jeu qui tombe du ciel. C'est une mauvaise décision d'Araujo qui intervient sur une vraie situation pour le PSG, qui à ce moment-là a déjà commencé un peu à retourner le rapport de forces. Cette faute, c'est quelque chose qui accélère une tendance qui était en train de se dessiner. Quand Paris accélère, joue avec de l'intensité et de la prise de profondeur, ils sont trop compliqués à prendre pour ce Barça-là, qui est une équipe qui défensivement présente beaucoup de lacunes.

Et moi, ce que j'ai aimé, ce que j'ai même adoré, c'est le parti pris d'une forme de simplicité. C'est-à-dire que Paris, l'air de rien, on peut tourner autour du pot, on peut essayer de se raconter des histoires... Cette saison, c'est une équipe qui brille dans la transition. C'est une équipe qui brille par sa vitesse d'exécution, parce qu'ils ont des joueurs percutants, parce qu'ils ont des joueurs capables, je pense à Vitinha, de lâcher la balle très vite dans la profondeur. Je n'aime pas le mot verticalité, mais on est là-dedans. Contrairement à d'autres périodes du PSG, où ils étaient beaucoup plus sûrs de leur football et multipliaient les temps de jeu, ce qui collait parfaitement aux qualités d'un Verratti. Mais tu n'avais pas la même capacité d'accélération qu'aujourd'hui. Alors, on peut dire que ce n'est pas du Luis Enrique pur jus, par rapport à son obsession de la possession. Mais je crois que c'est la bonne idée de jeu par rapport au profil de cette équipe. Et son intelligence, c'est de savoir s'adapter à son effectif. »

Alors que ses choix à l'aller ont été beaucoup discuté, cette fois, ils ont fait l'unanimité. Est-ce la victoire de Luis Enrique ?

« Ce n'est pas la victoire de Luis Enrique, même si je ne veux rien lui retirer. Mais c'est avant tout la victoire de la simplicité »

« Sur les plateaux télé, à la radio, dans la presse, il est arrivé qu'on reproche à Luis Enrique d'en faire trop, de jouer au plus malin, de faire parler de lui. Mais je veux laisser ça de côté. Avec cet effectif, dont on voit assez clairement les qualités et les défauts, il n'est pas nécessaire d'avoir ses diplômes d'état pour comprendre à peu près comment l'équipe doit jouer. Et sur ses choix, Luis Enrique a quand même parfois donné l'impression de vouloir réinventer le football. Et ça, c'est pour moi quelque chose qui a pu être préjudiciable à son équipe, notamment lors de PSG-Barça. Même si, en s'étant trompé dans des proportions aussi grandes, il s'en est sorti avec une défaite 3-2, ce qui avec la nouvelle règle sur les buts à l'extérieur, n'était pas un résultat si catastrophique.

Pour le retour, honnêtement, il fait l'équipe que, allez à 90%, on fait tous. C'était la meilleure équipe possible. Donc pour moi, ce n'est pas la victoire de Luis Enrique, même si je ne veux rien lui retirer, parce qu'évidemment être coach ce n'est pas juste faire une compo. Mais encore un fois, c'est avant tout la victoire de la simplicité. À un moment donné, il faut être très simple pour gagner. D'ailleurs, si on regarde des grands entraîneurs comme Klopp, Guardiola ou Ancelotti, ils ne passent pas leur temps à réinventer leur équipe d'un match à l'autre. Ils peuvent changer un élément ici ou là, parce qu'il y a un absent ou une rotation à avoir. Mais ils ne changent pas leur système. Donc parfois, il faut savoir faire ça, à ce moment-là de la saison surtout, il faut savoir ne pas jouer au plus subtil, on va dire.

Pour en revenir aux choix de Luis Enrique, mardi, je trouve que tactiquement, il y a des choses qui ont été vraiment très bien faites. Les zones de pression sur l'adversaire ont été très bien choisies. Le parti pris, même si là encore, il ne fallait pas être sorti de Saint-Cyr, de serrer beaucoup plus fort Lewandowski, de lui enlever le confort qu'il a pu avoir aller, ça a été capital. Et puis, il y a un joueur qui n'a pas été brillant balle au pied et dans l'animation, ce qu'il sait faire aussi, mais par contre tellement précieux à la perte du ballon, pour se placer, compenser, couper les lignes de passe, etc. C'est Warren. Et c'est là que je me dis que l'affaire, elle a quand même été bien préparée, parce qu'ils ont enlevé cette capacité du Barça à repartir vers l'avant. Le jeu court étaient annihilé par la qualité de placement des joueurs parisiens. Et le jeu long était aussi annihilé par le fait que Lewandowski se prenait une grosse charge, que ce soit Lucas Hernandez ou Marquinhos, à tour de rôle. Donc je trouve que ça a été très bien préparé et dans une forme de simplicité. »

Après le naufrage de Beraldo au Parc, c'était le retour de la charnière type Marquinhos-Hernandez, avec une grosse performance du Brésilien à la clé...

« Je pense que ça fait des années que je n'avais pas vu Marquinhos à ce niveau. Quand je l'ai vu faire ce geste après son sauvetage, ça m'a rappelé son match contre Barcelone en 2014 (victoire 3-2 en poule), en plus j'y étais. Il avait livré une performance XXL et pareil, en fin de match, après un sauvetage, il avait allumé le Parc comme ça avec sa rage. Pour moi c'était un peu "Retour vers le Futur" sur cette action et globalement sur sa performance, parce qu'il n'y a pas que cette intervention. Je l'ai trouvé monstrueux, alors que je faisais partie de ceux qui se demandaient s'il n'avait pas accumulé en lui trop de doute, sans remettre en cause la qualité de joueur. Mais il a été de toutes les déconvenues en Ligue des Champions et l'air de rien son capitanat a été remis en cause l'été dernier. Lors de la Coupe du Monde 2022, il a aussi vécu un échec douloureux avec le Brésil, où il est malheureux sur ce but croate, quand il dévie le ballon, alors que le Brésil était en train de se qualifier. Pour moi, tout ça avait forcément dû laisser des traces dans la cuirasse de ce mec.

«  Ce match va compter dans l'histoire de Marquinhos à Paris. Pour moi, il se réhabilite aux yeux du supporters »

Dans la confiance qu'il pouvait lire dans le regard des autres, ça disait désormais « Marqui, c'est fini. Marqui ne peut plus être capitaine. Marqui, il faut passer à autre chose ! ». C'est dur de vivre avec ça quand on a été vraiment quelqu'un qui compte et qu'on fait partie de la légende du PSG. Et bien, ressortir un match comme ça, dos au mur, dans ce contexte-là, franchement chapeau. Il faut le dire quand ça ne va pas, mais là, ça a été une très grande performance de sa part. Et ça va compter dans l'histoire de Marquinhos à Paris. Pour moi, il se réhabilite en quelque sorte aux yeux du supporters, en montrant qu'il est quand même un sacré défenseur, en plus d'être attaché à ce club et ce n'est pas anodin de dire ça. Les amoureux du PSG ont quand même beaucoup souffert du fait que les joueurs qui venaient à Paris, t'avais souvent l'impression qu'ils venaient pour les thunes, qu'ils venaient pour les conditions, qu'ils venaient pour la ville, et donc finalement pour beaucoup d'autres choses que le club lui-même. Et Marquinhos, on peut dire ce qu'on veut, c'est quand même un mec qui est grave attaché au club, qui l'aime, et qui doit souffrir de ne pas être aussi bon qu'il a pu l'être par le passé... et l'air de rien, d'avoir un mec comme ça, qui est prêt à tout donner pour le club, je trouve qu'il faut le saluer. Il y a trop de mecs qui sont passés dans ce club comme des prestataires de service. Marquinhos, franchement, il donne toujours ce qu'il a à donner. Parfois c'est pas suffisant, et ces dernières années, c'était pas suffisant. Son niveau a un peu diminué, voire parfois beaucoup diminué. Mais, il donne toujours ce qu'il a à donner. Mardi, il avait beaucoup à donner et il a donné beaucoup. »

Une nouvelle fois décisif et performant, Vitinha est devenu cette saison le taulier du milieu parisien. Comment analysez-vous cette transformation ?

« On a découvert cette saison que c'est un garçon qui a de la personnalité. Qu'il soit un beau joueur, un joueur créatif, technique, etc. Tu le sais depuis le début. Je me souviens de ses tout premiers matches, on se disait "tiens, c'est pas mal". Mais par contre, c'est quelqu'un dont on pouvait questionner la force de caractère, c'est-à-dire que tu sentais qu'il s'écrasait un petit peu quand il y avait des Neymar, des Messi, peut-être même des Mbappé. Quand tous les tauliers étaient là, tu sentais qu'il n'était pas lui-même. On a beaucoup causé sur ce que Neymar pouvait lui mettre dans la figure en guise de reproches et je pense que ça a pu l'inhiber. Et au haut niveau, ce qui fait la différence pour s'imposer, c'est le caractère. Et le caractère, c'est aussi être capable de soutenir la pression, la tension qui peut être mise parfois par les partenaires ou l'environnement du club.

L'an passé, il y avait un peu ce truc qui le remettait en question. Et cette année, je trouve que Vitinha a vraiment gagné en côté patron. Je vais ressortir un petit épisode sur le match aller. À un moment, il y a une récupération de balle. Il est au milieu de terrain légèrement sur le côté gauche et Mbappé fait l'appel dans le demi-espace gauche. S'il lui met, Mbappé part seul au but, mais il choisit de frapper. C'était pas le meilleur choix, ce que le jeu demandait, mais ça en dit beaucoup sur le nouveau Vitinha, qui est beaucoup plus sûr de lui. Il n'est plus le joueur qui touchait la balle et tout de suite la donnait soit à Neymar, soit à Messi, soit à Mbappé. Et c'est pareil à Marseille sur le but qu'il met. Il a Mbappé à gauche et Dembélé à droite. Franchement, il y a six mois, il la donne tous les jours à Mbappé, même s'il n'est pas le mieux placé. Et là, il sert Dembélé pour qu'il lui remette et il marque derrière. Ça, ce sont des signes d'une nouvelle forme d'autonomie. »

A quel poste le voyez-vous briller à l'avenir ? En six ou en huit ?

«  Quand il a le jeu face à lui, Vitinha voit clair, voit tôt, il sait prendre les bonnes décisions »

« Je dois dire que je suis assez surpris de voir Vitinha aussi bon dans ce rôle de six. Et il faut quand même saluer pour le coup l'inspiration de Luis Enrique, parce que pour moi, c'est un huit. Je le trouve beaucoup plus pertinent dans ce rôle-là. Il est vraiment très créatif, c'est presque un relayeur-meneur. Mais sa personnalité lui donne la possibilité de jouer six, parce qu'il n'a pas peur de recevoir la balle. C'est-à-dire que ce n'est pas le tout d'avoir les qualités techniques, il faut avoir le tempérament de recevoir la balle sous pression, ce que faisait à merveille un Verratti. Même s'il y a eu deux accidents notables, c'était quand même un expert de ça. Et c'est vrai, qu'en fait, ça met le jeu en ordre. Ça c'est un peu l'enseignement de la seconde période contre la Real Sociedad au Parc. C'est-à-dire que t'es à l'envers avec Ugarte en six, parce que la pression de la Real Sociedad est très bonne. Et quand au retour des vestiaires, il y a ce changement avec l'entrée de Vitinha à ce poste, ça finit par changer le rapport de forces. Mais si Vitinha présente des qualités pour occuper ce rôle, ça reste pour moi un huit. Je trouve qu'il a toutes les qualités du huit, c'est à dire le volume, la justesse et on le découvre cette saison, c'est quelqu'un qui a une très bonne frappe, qui sait prendre sa chance. Je pense que plus haut en dix, ce serait un peu plus compliqué, parce qu'il serait trop près de la zone de densité et il manque un peu de puissance et de quelque chose dans ses appuis pour se retourner. Par contre, quand il a le jeu face à lui, c'est quelqu'un qui voit clair, qui voit tôt, qui sait prendre les bonnes décisions... passe, frappe, dribble, il sait vraiment faire beaucoup de choses.

Il a maintenant 24 ans et c'est rassurant de le voir progresser cette saison. De passer un cap. C'était un joueur en développement quand ils l'ont pris. Et c'est vrai que cette année, avec la confiance de Luis Enrique et certainement aussi son management sur la prise d'initiative, la prise de décision et notamment dans les frappes, ça apporte beaucoup au PSG. Car c'était un gros manque à combler dans l'ère QSI. Le cycle précédent, il n'y avait pas un milieu qui était capable de mettre une frappe de loin. Pas un. Et le symbole de tout ça, c'était Verratti. C'est un joueur que j'ai adoré, mais il était incapable de mettre un but. C'est un truc de fou pour un joueur aussi spécial. Et non content de ne pas mettre de but, il ne frappait pas. Même à trois mètres de la surface, il faisait l’extra-passe, parce qu'il n'avait pas ça en lui. Mais ça manquait du coup dans le jeu parisien. La capacité d'avoir des milieux frappeurs comme tous les grands clubs en ont, à commencer par le Real avec des Kroos, Modric, même Casemiro quand il était là. Warren aussi a cette capacité-là. En tout cas, avec cette arme supplémentaire, je trouve que ça redimensionne un peu la capacité létale du PSG. »

De retour sur l'aile droite, Ousmane Dembélé a été omniprésent offensivement. Que retenez-vous de son match ?

« Dembélé a une technique exceptionnelle dans son registre, qui est celui de l'élimination. Et l'élimination, c'est sur un côté »

« Déjà, il faut dire que les dix à quinze premières minutes de Dembélé sont atroces. Il rate tout techniquement. Il rate même des contrôles. Il roule sur le ballon. Il tire mal son corner. Et après, en fait, à force de provoquer, il a commencé à faire la différence. C'est ça qu'il faut quand même que Luis Enrique garde à l'esprit. Dembélé est un joueur qui a une technique exceptionnelle dans un registre bien particulier, qui est celui de l'élimination. L'élimination, c'est sur un côté. Dans l'axe, en tant que meneur de jeu qui ne dit pas son nom, il n'a pas la technique pour ça. Ce n'est pas un joueur qui est connecté aux autres dans le sens appui, remise. Ce n'est pas Vitinha. Et heureusement d'ailleurs, parce qu'il apporte tout autre chose. Dembélé, tu peux l'utiliser de différentes façons, mais il a quand même un profil qui est clairement identifié. Pour moi, c'est le joueur le plus déstabilisant de la planète. Je pense qu'il n'y a pas d'équivalent depuis le déclin de Neymar. Il transforme les joueurs en plots. C'est unique, je pense, aujourd'hui. Tu as l'impression qu'il ne dribble pas, mais qu'il slalome. Il a tellement de changements d'appui complètement dingues. Il touche à peine le sol. Il est très déroutant et déséquilibrant.

Et à l'antenne (sur la chaîne L’Équipe), mardi, je disais "Surtout, il faut qu'il continue à provoquer, même quand ça ne passe pas" , parce qu'en fait, à chaque dribble, il les met dans dur. À chaque fois, il enlève du confort à son adversaire. Quand tu as un Dembélé face à toi pendant 90 minutes... Qui n'arrête pas de te provoquer, en sachant que c'est dur de l'attraper. Tu finis par voir rouge, comme c'est arrivé à Cancelo. Sa faute à froid, il ne la fait jamais en fait. C'est-à-dire que Dembélé ne va même pas dans le sens du but, donc il n'y a pas le feu. Et là il se jette pour faire un tacle, alors qu'il doit juste l'accompagner. Mais en fait, cette faute-là, ce n'est pas une faute isolée, c'est une faute qui est le résultat de tout ce que l'autre lui met dans le cerveau depuis le début du match. Et c'est là où Dembélé, je le trouve très fort d'ailleurs, car il a cette espèce d'inconscience, presque parfois dans ce registre-là, a toujours aller provoquer, provoquer, provoquer. La seule fois où je l'ai vu ne pas provoquer, c'est pendant la Coupe du Monde 2022 où il était surtout là pour couvrir son couloir, comme une sorte de Matuidi réinventé à droite. Mais Dembélé, son fond de sauce, c'est le dribble, c'est la percussion, c'est la provocation, c'est mettre son adversaire dans l'incertitude. Lors de ce Barça-PSG, il l'a particulièrement bien fait. »

Buteur à l'aller comme au retour, il a retrouvé le chemin des filets au meilleur des moments...

« Son inefficacité, c'est quelque chose que je lui reproche beaucoup. Tu ne peux pas être un joueur de ce niveau, un international français, finaliste de Coupe du Monde, passé par le Barça et maintenant au PSG... Et avoir autant de déchet devant le but. Ce n'est pas possible. Et ce n'est pas un mec qui n'a pas de chance, c'est un mec qui échoue sur des situations très simples d'un-contre-un avec les gardiens, qu'il joue systématiquement très mal, même sur un plan technique. Je me dis souvent qu'il faudrait qu'il en fasse davantage à l'entraînement, des séances spécifiques supplémentaires par exemple. Si on regarde les deux buts qu'il met, ce sont deux buts un peu à l'instinct.

Pour résumer Dembélé, il ne met pas les buts qu'il doit mettre, mais il a mis ceux qui étaient les moins probables. Sur l'égalisation au Parc, il se crée l'espace pour armer du gauche, parce que ça, il sait faire, se créer l'espace de tir. Et en dérapant, ça part en l'air et ça finit sous la barre. Je ne suis pas certain que c'est ce qu'il voulait faire. Il a frappé comme il pouvait, à l'instinct. C'est là où en fait, sur cette double confrontation, je suis très content pour lui et pour le PSG, parce qu'il a été déterminant, c'est lui qui remet son équipe dans le match à l'aller et au retour. Mardi, il ouvre bien son pied, il pose bien son appui, il roule bien sa cheville, etc. Ce qu'il ne fait jamais et ça fait mouche. Mais est-ce je me dis qu'il a vraiment progressé à la finition ? Non. C'est trop tôt pour le dire.

« Je pense qu'il voulait montrer aux Barcelonais que le vrai Dembélé, c'est celui qui est à Paris »

Sur cette double confrontation, il avait certainement un surcroît de motivation. Je pense qu'il voulait montrer aux Barcelonais que le vrai Dembélé, c'est celui qui est à Paris. On finit par ne plus le souligner tellement on l'a normalisé, mais c'est un mec qui désormais enchaîne les matches. C’est arrivé combien de fois dans sa carrière ? Donc je pense que si t'es supporter du Barça, tu l'as vraiment mauvaise, parce que tu te dis "  Merde, on s'est un peu fait enfler pendant cinq ans...", tellement Dembélé a souvent été absent. S'il enchaîne, en dépit du contexte parisien et de tous les dangers qui vont avec, c'est qu'il fait bien les choses et je pense qu'effectivement il devait être motivé à l'idée de montrer ça, même si c'est quelqu'un qui montre toujours de l'envie. Certes, il a du déchet et son jeu ressemble parfois à un puzzle. Mais en tout cas, je ne le prends jamais en défaut de motivation.

Mbappé, on voit bien qu'il y a des matchs où il n'est pas très concerné, où il joue la carotte... Mais pas Dembélé. Donc je ne suis même pas sûr qu'il ait donné plus que d'habitude sur ce match. Après, vous l'aurez compris, moi je suis très fan de ce joueur. Mais ça n'empêche pas que souvent je m'arrache les cheveux quand il rate des trucs incroyables devant le but. Je me dis "Mais putain, verrouille ton pied, cherche une zone ! ". Ça me rend fou et heureusement, une fois toutes les pleines lunes, ça finit en lucarne ou sous la barre. C'est une sacrée frustration. Mais si on reste sur l'esthétique, à chaque fois quand je le vois, il n'y a pas une minute où je m'ennuie. C'est quand même un joueur rare. »

A l'origine de l'expulsion d'Araujo, Bradley Barcola a pesé sur le résultat de cette rencontre à seulement 21 ans. Est-ce qu'il vous épate ?

Clairement. C'est sa prise de profondeur sur un super ballon de Nuno Mendes qui change le match. Il y a 1-0 pour Barcelone et il provoque l'expulsion de Araujo qui redessine tout le reste. Et ça c'est très fort. Mais c'est dans la lignée de son entrée en jeu à l'aller, où il a été quasiment un game changer pour le PSG. Avec lui, Paris a réussi à renverser le match en deux coups de cuillères à pot. Et même à se procurer ensuite des balles de troisième but très nettes, avec la barre trouvée par Barcola, justement, et le poteau par Dembélé. C'est pour ça que je voyais le PSG passer au retour. En ayant produit aussi peu, d'obtenir autant montrait que s'ils trouvaient de la continuité avec les mêmes ingrédients, ce Barça-là ne pourrait pas résister. Pour moi, en dépit du but à combler, le rapport de forces était quand même favorable au PSG, avec aussi ce sentiment que Barcelone avait donné beaucoup pour ne gagner que par un but d'avance.

Barcola, c'est un des symboles de ce nouveau PSG et une belle surprise par rapport à son transfert de Lyon. Je pensais que ce serait un joueur qui allait se développer tranquillement et progressivement pour peut-être un jour trouver sa place. Mais tout s'est passé très vite pour lui. C'est ça qui fait aussi la force de Luis Enrique, c'est de donner de la confiance à un jeune qui vient d'arriver, qui est encore un rookie, avec quoi ? Six vrais mois de Ligue 1 dans les jambes avec Lyon... et de le traiter d'égal à égal avec les autres. Et donc, tu n'es plus dans un système avec une hiérarchie bien établie, c'est-à-dire avec tout en haut des Neymar, Messi, Mbappé ou Cavani, Di Maria, Ibrahimovic avant. Un jeune pouvait difficilement avoir sa chance dans ce contexte-là. Et quand je dis un jeune, parfois même des talents plus confirmés, comme Draxler, ont rapidement abdiqués, car ils avaient cette impression que les dés étaient pipés... Mais là le management est fait de telle manière que, peu importe ton CV, t'es toujours fort. Ça change beaucoup de choses. Tout en sachant aussi que tu n'as plus tout à fait les mêmes statuts et que ce serait beaucoup plus difficile à mettre en  place avec des Neymar et Messi encore dans l'effectif.

« Avec le management de Luis Enrique, un jeune comme Barcola peut être en confiance »

Aujourd'hui, avec le management de Luis Enrique, un jeune comme Barcola (ou Warren) peut être en confiance. Et à l'arrivée, tu sens que ce mec-là, quand il rentre, il se pose zéro question. Il ne fait pas tout juste, mais il fait tout à fond et il joue vraiment sur ses qualités. Ça veut dire que le discours du coach doit être "Fais ce que tu sais faire" et il le fait très bien. Moi je trouve que mardi, Barcola c'était l'identité du PSG cette saison. C'est-à-dire prise de vitesse, provocation, déséquilibre, etc. Et lui, il est très bon là-dedans.

Il faut quand même se rendre compte que le gamin a mis sur le banc Kolo Muani et Ramos, qui ont coûté à eux deux 170 patates. Un gamin qui n'était pas forcément annoncé comme un crack de sa génération. Il n'arrive pas comme un pape à Paris. Il arrive comme Barcola, jeune espoir lyonnais très bon, mais dans une équipe qui jouait le milieu du tableau. Avec le PSG, à partir du moment où il rentre, il donne satisfaction. Il n'y a plus de questions à se poser à son sujet. Et ça, c'est balèze. »

Luis Enrique a loué après le match l'attitude de Kylian Mbappé, en le qualifiant de « leader par l'exemple ». Comment l'avez-vous trouvé ?

« Ce que j'ai aimé, c'est effectivement son attitude sans ballon. C'est une des premières fois où je le vois presser régulièrement. Alors ok, ce n'était pas Sadio Mané, mais il a pressé. Il n'a jamais rechigné à y aller globalement. Il fait même quelques vrais retours défensifs. Sur le dernier but, c'est lui qui vient récupérer le ballon d'un tacle dans sa propre surface et qui ensuite se projette pour sceller le sort du match. Je l'ai vu impliqué. Il me semble que sur l'ouverture du score de Barcelone, il est venu haranguer ses partenaires pour ne pas qu'ils baissent la tête.

Et avant le coup d'envoi, quand je l'ai vu rassembler tout le monde et dire "Allez les gars , on y croit ! ", j'attendais de voir comment ça allait se traduire sur le terrain, parce que si c'était pour faire la même production en termes d'investissement, d'engagement physique et de langage corporel que dans ses derniers matches... Et là on l'a vu ne pas ménager ses efforts. Parfois même, il est allé un peu seul au pressing. Comme il n'a pas l'habitude de le faire, parfois il l'a fait un peu dans le désordre. Mais je crois que même pour lui, c'était important de faire ce travail-là, car au niveau physique, il s'impliquait et restait connecté au match. C'est-à-dire qu'il n'y a pas un moment où, trop longtemps, je l'ai senti devenir spectateur. Ce qui peut lui arriver. Et là, ce n'est pas arrivé. Et finalement, il a été récompensé de ses efforts avec ses deux buts.

Maintenant, je ne le trouve pas toujours inspiré en ce moment. Il s'en sort plutôt bien au niveau statistique au retour. Sur le plan offensif, son bilan est assez flatteur par rapport à sa réelle production. C'est-à-dire qu'il met un penalty, ce qui est devenu la routine pour lui depuis la dernière finale de Coupe de Monde, A priori, au niveau maîtrise mentale, ça va pour lui. Et puis il y a ce but du break en fin de match, un peu heureux quand même, parce qu'il ne joue pas très bien le coup dans un premier temps face à Ter Stegen. Et il profite d'un coup de billard - merci Koundé qui lui remet - pour finir de près. Ce doublé lui permet un peu de sauver les apparences, parce que dans le contenu, il existe quand même moins que tous les autres quasiment. Mais avec ce qu'il a donné à son équipe en termes d'engagement et d’implication, je n'ai pas trouvé que c'était injuste, contrairement à toutes les fois où il a pu passer entre les gouttes en marquant un but.

« Je pense que c'est ce que Luis Enrique attend de Mbappé depuis le début »

Je pense que c'est ce que Luis Enrique attend de lui depuis le début. Moi, je ne m'en suis jamais caché, donc je ne vais pas retourner ma veste maintenant, je ne suis pas fan du tout de sa gestion du cas Mbappé. Mais par contre, je sais que c'est ce qu'il lui a demandé, c'est-à-dire indépendamment du fait de marquer des buts, d'en faire plus pour emmener son équipe, ce qu'il n'a pas toujours fait cette saison et pour différentes raisons. C'est un des points de divergence entre les deux, en tout cas un des points de crispation. Donc but ou pas but mardi, je pense que Luis Enrique l'aurait de toute façon mis en avant, comme il l'a fait en conférence de presse. Par rapport à l'idée qu'il se fait d'une performance individuelle. »

Cette qualification en demi-finale de Ligue des Champions ne donne-t-elle pas quand même un peu de crédit à Luis Enrique dans sa gestion du cas Mbappé ?

« Ceux qui me suivent dans L’Équipe du Soir le savent, je n'ai pas de problème à reconnaître quand je me trompe. Là, je dis pas que j'ai raison. Mais je dis que je ne pense pas une seule seconde que Mbappé a besoin de ce type de gestion pour être bon sur le terrain dans les matches importants. Contre la Real Sociedad, l'air de rien, c'est lui qui te sauve les fesses au retour, tout en étant irréprochable. Et je ne pense pas qu'il aurait donné moins sans ce traitement particulier de Luis Enrique, parce que c'est quand même un mec, qu'on l'aime ou on l'aime pas, qui répond très souvent présent lors des grands rendez-vous. Il n'a pas besoin d'être managé un peu à la carotte et au bâton pour se pousser au cul et sortir de grandes performances. C'est quelqu'un qui se fixe des objectifs tout seul. Sinon, il n'aurait pas des bilans pareils en Ligue des Champions, en championnat dans les gros matches, contre l'OM...  On ne peut tout juger à l'aune des résultats.

Il ne s'est rien passé entre l'aller et le retour, pourtant dans un cas, il a été cataclysmique. Parce que vraiment, il a été cataclysmique au Parc contre Barcelone. Et là, mardi, je l'ai trouvé très courageux et impliqué, en plus de son doublé. Alors, quel est l'effet de la gestion de Luis Enrique qu'on doit retenir ? C'est celui sur le match aller ou celui sur le match retour ? Je pense que mardi la motivation et l'envie de bien faire de Mbappé viennent plus de ce que représentait cette rencontre pour lui. Il ne voulait pas finir son septennat à Paris sur un-non match et une élimination qui auraient gâcher la fin de son histoire au PSG. Je pense que c'est ça qui l'a animé. Son désir de ne pas finir comme ça. »

Que répondez-vous à ceux qui disent « De toute façon, les journalistes sont à la botte de Mbappé, tellement il est important. Ils ne seront jamais objectifs avec lui... » ?

« C'est une question intéressante qui me fait penser au traitement PSG-OM. Quand on estime que la presse est pro-parisienne et les supporters du PSG estiment qu'elle est anti-parisienne. Tu l'entends ça aussi. Il y a eu beaucoup de procès populaires faits à L’Équipe notamment. Je pense que pour Mbappé, c'est la même chose. Il y en a plein qui vont penser "Ouais, mais il est protégé, couvert par les médias français" et peut-être que chez certains de mes confrères c'est effectivement le cas, parce que pour X raisons ils n'ont pas envie d'abîmer Mbappé... Mais a contrario, moi j'entends aussi beaucoup de supporters dire "Mais vous êtes trop dur avec Mbappé, quand il sera parti au Real, d'un seul coup tout le monde le trouvera formidable. Il n'y a qu'en France qu'on ne sait pas l'aimer." Donc ce que j'ai tendance à me dire, c'est qu'en fait, il n'y a pas une presse, mais différents titres de presse déjà, mais aussi différentes sensibilités et différents journalistes.

« A L’Équipe, il n'y a pas une uniformité de ton par rapport à Mbappé, au contraire il y a une grande divergence »

C'est-à-dire qu'à l'intérieur du groupe L’Équipe, que ce soit les journaux ou la chaîne, on a différentes sources par rapport au PSG et par rapport à Kylian Mbappé. Et donc il n'y a pas une uniformité de ton par rapport à Mbappé, au contraire il y a une grande divergence, parfois même il y a presque trop de divergences, ce qui fait que tu te demandes où est le juste milieu et la juste mesure. Car il y a pas mal d'excès autour de lui. Parfois, on lui met des choses sur le dos en occultant complètement son bilan exceptionnel à son âge et d'autres fois, quand il n'est pas bon, et bah on lui trouve beaucoup de circonstances atténuantes. Et ça dépend des journalistes, en fait. Donc là-dessus, je comprends la question, parce que c'est quelque chose que moi-même parfois je peux me dire en observant les uns et les autres. Mais à l'arrivée, je m’aperçois qu'on entend les deux sons de cloche mais de manière un peu extrême. »

En tout cas, une telle puissance médiatique, c'est du jamais vu dans le football français...

Complètement et il y a deux choses qui expliquent cela. Il y a d'abord l'époque dans laquelle on vit, qui est l'époque des chaînes d'infos en continu, des débats foot quotidiens quasiment H24 et des réseaux sociaux. Aujourd'hui, tout le monde se passionne plus ou moins pour le foot, beaucoup plus qu'il y a vingt-cinq ou trente ans. Et puis il y a la personnalité de Kylian qui revendique le fait d'être beaucoup plus qu'une icône du foot, avec une image très construite et une vraie stratégie marketing derrière. Tout est pensé et programmé depuis le début de sa carrière. On a affaire à quelqu'un de son temps, qui est très connecté et en même temps qui fait savoir qu'un sportif est une personnalité qui peut produire une opinion, qui peut faire bouger les choses...

A l'inverse, un Zidane était quelqu'un qui ne s'engageait quasiment jamais sur le plan sociétal, parce que son père lui avait dit "Toi, t'es footballeur, contente-toi de bien faire ça et le reste, laisse ça aux autres". Mbappé, lui, est le produit d'une génération décomplexée, où même des gens issus de tous horizons revendiquent ce qu'ils sont et veulent leur part du gâteau. Ce qu'assume d'ailleurs très bien la mère de Kylian. On le voit, elle est spéciale, elle connaît les règles du jeu et elle les joue à fond. Je pense qu'il faut respecter cela. Et à l'arrivée, c'est vrai qu'on est sur un ovni médiatique avec Mbappé. C'est quelque chose qu'on n'avait jamais vu. »

Concernant le traitement médiatique réservé au PSG, on a parfois le sentiment que des choses négatives sortent au moment des échéances importantes pour le club. Avec France Football, vous avez justement publié des révélations sur la fin de Neymar à Paris qui ont fait du bruit entre les deux matches du Barça...

« Moi, je n'ai pas de problème avec le fait qu'on se pose la question. Pour répondre précisément, dans un mensuel comme le nôtre, parce que France Football n'est plus un hebdomadaire (ou même un bi-hebdomadaire entre 1997 et 2013), on programme les sujets très longtemps à l'avance. Surtout quand on produit des enquêtes comme celles qu'on a sorti sur N'Golo Kanté ou sur le business des familles de footballeurs. Ce sont des enquêtes au long cours. Et il se trouve que l'enquête sur Neymar a été lancée il y a maintenant plusieurs mois et qu'elle a abouti depuis peu. Même s'il y a effectivement des anecdotes un peu sur la fin de son passage à Paris, l'angle était davantage sur ce qu'il devient depuis qu'il a quitté le PSG, entre ses blessures, l'Arabie Saoudite, ses frasques "La Croisière s'amuse" qui tournent mal, ses procès aussi.... Pour nous, c'était surtout "Neymar, que deviens-tu ? ". Concernant la date de publication, on sait que quand on arrive en mai-juin, on est déjà sur les numéros Euro, mercato, etc. Donc on avait prévu de la sortir là.

Jamais ça n'a été corrélé avec l'actualité du PSG. Vraiment pas. C'est juste que c'était programmé comme ça depuis des mois. Quand on se lance dessus en novembre-décembre, à aucun moment on se dit "Attention, regardons le calendrier... en avril, le PSG pourrait jouer son quart de finale de Ligue des Champions", on n'est pas du tout là-dessus. On essaie de proposer des contenus qu'on ne retrouve pas ailleurs et on savait que ça pourrait intéresser les amoureux du PSG, qui n'ont pas été insensibles au passage de Neymar, que ce soit en bien ou en mal. Car c'est quelqu'un qui ne laisse pas indifférent. Et s'il est aussi clivant, c'est que ça raconte quelque chose, c'est qu'il excite les passions. Nous, on s'est dit "Ça reste Neymar, mais qu'est-ce qu'il devient ce garçon ?". Tant mieux si l'enquête a fait autant parler... C'est toujours mieux que nos sujets soient commentés. Alors après, chacun commente comme il veut. Il y a la liberté de la presse, mais il y a aussi la liberté du lecteur. J'espère juste que ceux qui ont en ont parlé négativement, ont bien lu tout le papier. »

Pour en revenir à l'actualité du PSG, comment voyez-vous la suite de la Ligue des Champions, avec cette demi-finale contre Dortmund à venir ?

En général, je suis quelqu'un de très analytique, qui aime bien connaître les raisons structurelles d'un succès. Mais parfois, il faut accepter qu'on ne voit pas tout et qu'il peut y avoir quelque chose de l'ordre du destin. Ce PSG-là n'est vraiment pas le PSG le plus emballant que j'ai vu sous QSI. J'ai vu des PSG bien plus impressionnants, des PSG bien plus talentueux et des PSG bien plus cohérents. Bon, une fois qu'on a dit ça, revenons sur le parcours européen de cette saison. En phase de poules, t'as un premier gros tournant contre Newcastle au Parc, qui est ce penalty très généreux qui tombe un peu du ciel. Et comme tu arraches ce match nul au bout du bout du temps additionnel (98e minute), c'est une sorte de coup du destin, qui vient te sauver les miches à ce moment-là.

Ensuite, tu finis deuxième de ton groupe, normalement t'es promis à un cador européen. Et là tu tires la Real Sociedad qui traverse en plus sa pire période (aucune victoire sur les quatre matches disputés avant de se déplacer au Parc)... Ensuite, tu joues ce quart de finale contre le Barça, et alors que tu perds à l'aller et que tu es mené 1-0 très rapidement au retour, tu as Araujo qui commet l'irréparable. Et maintenant, en demi-finale, tu vas affronter Dortmund, ce qui est inespéré à ce stade de la compétition. Tu as rarement eu un demi-finaliste de ce profil-là. Attention, je ne veux pas enlever le mérite au PSG. Dit comme ça, ça a l'air d'être comme les gagnants de l'EuroMillions...

«Ce PSG-là a cette capacité à prendre tout ce que le sort, les faits de jeu, les tirages lui proposent »

Non, au final, je trouve que cette équipe-là, elle a peut-être un destin. Bien sûr, il va falloir les sortir Dortmund, quand même. Mais tu ne joues pas City ou le Real en aller-retour. Tu as la chance de jouer Dortmund. Il y a des succès collectifs qui échappent parfois à l'analyse. Il y a des saisons comme ça, ça sourit. Le Real Madrid a connu ça en 2021-2022. Je pense qu'ils étaient inférieurs à Paris. Je pense qu'ils étaient inférieurs à Chelsea. Je pense vraiment qu'ils étaient inférieurs à Manchester City. Et je pense qu'ils étaient inférieurs à Liverpool. Et à chaque fois, sur ces matches, ils ont été dominés, voire archi-dominés. Mais ils ont gagné cette Ligue des champions.

Donc ce que je dis, ce n'est pas contre Paris. C'est que même des très grands clubs ont parfois eu des saisons où tu es un peu accompagné par une forme de réussite. Mais la force de ce PSG-là, c'est d'avoir cette capacité à prendre tout ce que le sort, les faits de jeu, les tirages lui proposent. C'est-à-dire qu'il ne passe pas pour l'instant à côté des opportunités que les circonstances lui offrent. Et ça c'est une grande force. Faire des exploits, c'est balèze. Mais de prendre ce que tu es supposé prendre, c'est fort aussi. Parce que tu es supposé prendre l'opportunité de tirer la Real Sociedad et tu l'as prise. À partir du moment où Araujo se fait stupidement expulser, tu dois prendre ce que te donne le Barça. Et bien, je pense que là Dortmund en demi-finale, c'est une opportunité qui est incroyable et que ce PSG, je parle dans sa mentalité et presque dans sa narrative, comme disent les anglais, il est presque construit pour prendre ce que les circonstances lui donnent, c'est-à-dire un adversaire comme Dortmund, qui est une très bonne équipe, mais pas un monstre.

Autant, quand tu prends Manchester City en 2021, honnêtement, pas une seule seconde je nai pensé que Paris pouvait passer. Sur ces deux matches, il n'y avait pas photo. Mais là, putain ! On va parler de Luis Enrique, du jeu, des joueurs... Ça c'est une partie de l'histoire. C'est peut-être une équipe qui est aussi portée cette saison par un destin et qui doit en profiter. D'ailleurs, pour rester sur le côté irrationnel, on pourrait même rajouter les deux buts de Dembélé face au Barça qui viennent un peu de nulle part... Un peu comme le doublé de Thuram contre la Croatie en 1998, dont une frappe du gauche enroulée assez surréaliste... Qu'est-ce que tu veux analyser ce truc-là ? Parfois, ça ne s'analyse pas, parfois il y a le destin et l'écriture d'un truc qu'il faut juste savoir accompagner et savourer. Quand tu es supporter parisien, tu es peut-être face à ce truc-là et après il sera temps d'essayer de savoir le pourquoi du comment... Pour le PSG, les planètes semblent en tout cas vachement bien alignées pour aller au bout cette année. »

Propos recueillis par Numéro 10

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